Le redressement financier de Transat se poursuit et sera terminé en 2015 comme prévu. C’est la promesse qu’a réitéré Jean-Marc Eustache, le président et chef de la direction de Transat A.T. jeudi dernier, le 24 octobre, à l’occasion d’un petit déjeuner organisé par le journal Les Affaires. Après avoir rappelé la nature du modèle d’affaires de Transat, Monsieur Eustache a fait un survol des tendances du marché du tourisme international. A long terme la tendance est très positive. Il se vend un milliard de voyages internationaux par année et les acheteurs de ces voyages dépensent environ mille milliards de dollars. Selon M. Eustache ces chiffres pourraient doubler d’ici 2030. Mieux encore, le tourisme international est moins affecté que le voyage d’affaires par les crises économiques et il continue de croître à un rythme annuel de 3-4%. Les consommateurs couperaient dans leurs achats de biens durables et de services avant de couper dans leurs vacances.
Les destinations les plus prisées demeurent la France, l’Italie et l’Espagne qui attirent le cinquième des voyageurs internationaux. Mais les modes changent et plusieurs pays enregistrent une croissance très rapide du nombre de leurs visiteurs internationaux. Monsieur Eustache mentionne le Maroc, la Turquie, l’Inde, le Cambodge, la Russie et le Pérou. Finalement il y a quelques pays où le nombre de visiteurs est en décroissance, dont la Tunisie, la Hongrie et le Canada où le nombre de visiteurs étrangers a diminué de 20 % au cours de 10 dernières années. Le président de Transat a résumé brièvement son analyse du problème: « Si vous voulez des pistes, pensez : produit vieillissant à renouveler, concurrence accrue, accès aérien onéreux, bureaucratie tatillonne (visas), dollar fort, marketing insuffisant… Autrement dit, on fait face à un écheveau de facteurs, et le dossier n’est pas facile. » Par contre les canadiens voyagent beaucoup à l’étranger ce qui constitue une excellente nouvelle pour Transat.
La traversée du désert de Transat
Monsieur Eustache, a rappelé combien la situation financière des années 2010, 2011 et 2012 a été difficile. La concurrence sur les marchés du sud à compter de 2010 a été terrible. Trop d’entreprises ont augmenté le nombre de sièges offerts et ont coupés leurs prix pour des produits qui se ressemblaient tous. Le président de Transat a admis que le problème n’est pas nouveau mais il a avoué que son entreprise a été trop lente à réagir. Il y a également eu un problème de gestion de la flotte d’avions. Transat utilise des Airbus A-330, dont elle est propriétaire, pour ses vols vers l’Europe mais ces avions sont trop gros pour les destinations soleil qui sont mieux desservies par des Boeing 737 qu’elle loue selon ses besoins. L’hiver une partie des A-330 sont donc inutilisés, mais ils continuent de coûter très cher. C’est ce qui expliquerait en partie la perte d’exploitation de près de 60 millions enregistrée en 2012.
A compter de 2012, monsieur Eustache et son équipe ont lancé un vaste programme de redressement qui repose principalement sur une réduction des coûts et sur une meilleure gestion de la flotte d’avions. L’objectif est de livrer 75 millions de dollars d’économies annuelles récurrentes. En 2012, les économies réalisées se sont chiffrées à 20 millions; en 2013, ce sera 15 millions suivi de 20 millions par année en 2014 et 2015.
Vu de l’extérieur, la principale différence concerne la gestion de la flotte de gros porteurs qui deviendra modulable à compter de 2015. Pour les petits porteurs, c’est déjà le cas depuis 2003 mais avec l’aide de sous-traitants comme WestJet et CanJet qui fournissaient des appareils et des équipages additionnels pour les voyages vers le sud l’hiver. La nouveauté, c’est que Transat continuera de louer des petits porteurs additionnels, l’hiver surtout, mais qu’elle en confiera l’opération à ses employés à compter de l’été 2014. En plus d’être très rentable, cette décision permettra de consolider l’emploi. A compter de 2015, le ratio petits porteurs/gros porteurs devrait s’en trouver amélioré. Plusieurs autres mesures d’économie ont déjà été mises en places. M. Eustache a donné l’exemple de l’hébergement des équipages. À Paris par exemple, Transat ne loge plus ses équipages dans un petit hôtel du quartier latin mais plutôt dans un hôtel voisin de l’aéroport, ce qui permet d’économiser à la fois sur le coût des chambres et sur le transport des équipages. Ce genre de mesures a permis à Transat de réduire ses coûts d’opération de 5 millions de dollars par année.
Pour les voyages transatlantiques, la position de Transat est plus confortable que pour le sud en raison de ses liaisons directes entre le Canada et une trentaine de destinations européennes. Pour ces routes, Jean-Marc Eustache affirme que son entreprise possède la meilleure structure de coût de l’industrie, ce qui lui a permis de se tailler des parts de marchés de 38% sur la France et de 22% sur le Royaume-Unis. Quant à Air Canada Rouge, le président de Transat affirme que cette concurrence nouvelle n’a pas empêché sa compagnie de réaliser le meilleur troisième trimestre de son histoire. Le principal défi que Transat devra affronter au cours des deux prochaines années, selon monsieur Eustache, sera de mieux intégrer l’utilisation du web comme outil de marketing tout en protégeant les 600 agences de voyages, dont une centaine qui lui appartiennent, avec lesquelles elle travaille déjà . Quant aux résultats du quatrième trimestre qui seront publiés en décembre prochain, monsieur Eustache maintient qu’ils seront supérieurs à ceux de l’an dernier.
Daniel Bordeleau
daniel.h.bordeleau@infoaeroquebec.com
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Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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