Airbus met au point des systèmes et une architecture « plus électrique » afin d’améliorer le rendement global de ses futurs avions. Il s’agit d’utiliser moins d’énergies hydraulique et pneumatique mais l’Européen, tout en assumant ses choix, admet implicitement être en retard sur le Boeing 787. Airbus travaille néanmoins sur la prochaine génération.
Pendant ce temps, ATR, Dassault et Airbus Helicopters mènent leurs propres études et essais. En jeu pour tous ces constructeurs : un allègement et une amélioration de la fiabilité des systèmes électriques. Un colloque sur le sujet, MEA 2015, s’est tenu à Toulouse au début du mois.
Charles Champion, directeur de l’ingénierie chez Airbus, attend beaucoup du système EGTS de roulage électrique que Safran et Honeywell testent en ce moment. « Le gain en consommation pourrait être de 3 % au cours d’un vol moyen – temps de roulage inclus – sur A320 », estime-t-il. Le programme entre dans sa phase de production et Airbus a commencé à le proposer à ses clients.
Etienne Foch, directeur des recherches en réseau électrique chez Airbus, suggère de remplacer le groupe auxiliaire de puissance (APU) et l’éolienne de secours (RAT) par une pile à combustible. Sans perdre en sécurité, on gagnerait en masse et en simplicité. En outre, une pile à combustible ne produit ni CO2, ni oxyde d’azote.
Il faudrait néanmoins embarquer un encombrant appareil de reformage afin de produire de l’hydrogène à bord. L’autre option, l’hydrogène liquide, implique un système de refroidissement complexe et la logistique associée, poursuit Etienne Foch.
Zodiac Aerospace a actuellement un projet de recherche et développement (R&D) qui vise à tester une pile à combustible sur un avion d’affaires Dassault Falcon en 2016. L’hydrogène sera gazeux, sous haute pression. Selon Julien d’Albigny, l’ingénieur en charge du projet chez Zodiac, une application dans les avions commerciaux pourrait être de fournir de l’électricité à des éléments comme les toilettes et les fours de l’office.
Dassault mène des travaux de R&D en vue de doter un futur Falcon, à l’horizon 2020-2025, d’une architecture plus électrique. La puissance installée serait donc beaucoup plus importante que les 50 kW du Falcon 7X.
En revanche, la fiabilité prévue des systèmes électriques, en particulier celle de l’électronique de puissance, reste un obstacle, souligne Jean-Marc Le Peuvédic, architecte systèmes futurs pour l’énergie à bord. Il faudrait atteindre un taux d’une panne pour 10 000 heures de vol, soit 10 à 100 fois mieux que la performance mesurée aujourd’hui. L’industrie automobile a résolu le problème en n’améliorant que partiellement la technologie elle-même… et en changeant sa méthode de prévision de la fiabilité.
Les températures élevées nuisent à la fiabilité des composants. Une clé est donc la modélisation thermique, y compris pour les températures transitoires. Des essais de validation d’un tel modèle se déroulent à l’institut Fraunhofer-IBP à Stuttgart, en Allemagne. Réduire le besoin en refroidissement irait aussi dans le bon sens, puisque les circuits de refroidissement contribuent à la traînée, note Jean-Marc le Peuvédic.
En fait, la tendance est déjà engagée avec le Falcon 5X. Un démarreur électrique remplacera l’équipement pneumatique classique. Une raison est que seul un moteur électrique peut fournir le couple nécessaire pour mettre en route le turboréacteur Snecma Silvercrest. Celui-ci vise une consommation réduite, d’où une soufflante agrandie.
Chez les hélicoptères, l’AgustaWestland AW189 emporte déjà une APU conçue pour une architecture plus électrique. Il s’agit de l’e-APU 60 de Microturbo, qui peut fournir 60 kW. Elle peut être utilisée en vol pour pallier la défaillance d’un alternateur ou redémarrer un moteur.
Mais, chez Airbus Helicopters, on a renoncé à proposer sur monomoteur un moteur électrique de secours capable de rendre l’autorotation plus sûre. Les essais de 2011 avaient été concluants. Toutefois, le système, encore trop lourd, aurait réduit la charge marchande de l’équivalent d’un passager. Les progrès des batteries permettent d’espérer une puissance spécifique (mesurée en kW/kg) suffisante en 2020.
Autre piste, un rotor arrière électrique – il aurait besoin de 100 à 300 kW. L’hélicoptère serait ainsi débarrassé de la lourde et complexe transmission arrière. Là encore, la technologie actuelle est trop lourde : on ajouterait plus de 70 kg sur la queue. Un surpoids qu’il faudra diviser par cinq, estime-t-on chez Airbus Helicopters.
Du côté des avions régionaux, un ATR 72 doit voler l’été prochain dans le cadre du programme européen de recherche Clean Sky. Son système de conditionnement d’air sera électrique. En outre, un actionneur de train d’atterrissage sera installé sur un banc d’essai à bord. Il ne sortira ni ne rétractera le train mais fera partie du réseau électrique de
Thierry Dubois est journaliste aéronautique depuis 1997. Ingénieur Enseeiht, il s’est spécialisé dans la technologie – moteurs, matériaux, systèmes, etc. Il collabore régulièrement à plusieurs publications françaises et américaines, notamment en couvrant l'actualité des constructeurs
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