Salon du Bourget 2017 – Le Q400 sauve l’honneur de Bombardier.
LE BOURGET – 1051 mots – Temps de lecture : 4 minutes. Alors que l’édition 2015 du Salon de l’aéronautique et de l’espace de Paris, connu sous le nom de Salon du Bourget, fut l’occasion pour l’avionneur québécois Bombardier d’y présenter son tout dernier-né, le CSeries, sous la forme d’un CS100 aux couleurs de Swiss, plusieurs espéraient que l’édition 2017 serait l’occasion de l’annonce d’au moins une commande du nouveau biréacté de cent places.
Il n’en fut rien lors de ce 52ième Salon du Bourget. Bombardier en profita pour y présenter au statique un CS300 aux couleurs d’AirBaltic dont le président, en conférence de presse, en vanta les vertus depuis sa mise en service en décembre 2016. D’ailleurs, le seul autre aéronef de Bombardier au statique, fut un bi turbopropulsé Q400 aux couleurs du transporteur canadien WestJet Encore, assemblé à Downsview, en banlieue de Toronto, en Ontario. D’ailleurs, ce fut le modèle qui sauva les meubles avec trois annonces de commandes lors de cette grande messe internationale de l’aérospatiale.
Ainsi, le 19 juin, premier jour du Salon, le transporteur aérien Philippine Airlines s’est prévalu des options inscrites dans une commande passée antérieurement auprès de Bombardier et acheta ainsi sept avions Q400 de plus. Cette annonce du transporteur des Philippines fit passer ainsi à 12 appareils, le total des aéronefs commandés fermes, l’acquisition des cinq premiers avions avait été annoncé le 8 décembre dernier.
Au prix de catalogue du Q400, la valeur de cette commande ferme passe ainsi à 235 millions de dollars américains. Le premier avion de l’entente, un Q400 configuré pour accueillir 86 passagers répartis en deux classes, devrait être livré en juillet 2017.
Avec l’exercice de ces options, le carnet de commandes fermes du Q400 de Bombardier s’établit maintenant 585 appareils.
Le jour suivant, le transporteur indien SpiceJet ratifia une lettre d’entente pour l’acquisition de jusqu’à 50 avions biturbopropulsés Q400 Next Gen. Soulignons que ce transporteur exploite déjà vingt Q400 dans une configuration à 78 sièges desservant des destinations nationales et internationales.
Si SpiceJet exerce toutes ses options, la montant de la commande atteindra 1,7 milliard de dollars américains.
Le même jour, l’avionneur de Saint-Laurent dévoila l’identité du client ayant commandé ferme cinq avions Q400, le 9 juin dernier. Ainsi, Ethiopian Airlines réalisait ainsi sa quatrième commande de Q400 qui portera à 24 le nombre de biturbopropulsés de Bombardier dans sa flotte.
Finalement, le mercredi 21 juin, Bombardier signa une lettre d’intention portant sur l’achat de deux biturbopropulsés Q400 par le transporteur sud-africain CemAir.
En tenant compte de ces deux Q400, à terme, CemAir exploiterait 17 appareils de Bombardier soit cinq Q400 et douze biréactés de transport régional CRJ.
Mais ne seront enregistrées durant ce Salon, aucune commande de CRJ, ni de CSeries dont la dernière remonte au mois de décembre dernier alors que le gouvernement de Tanzanie a commandé deux exemplaires du CS300 qui seront loués et exploités par Air Tanzania basée à Dar es Salaam. Ceci porta le carnet de commandes fermes du bireacté de cent places à 360 exemplaires. Des rumeurs avaient couru dans les semaines précédant le Salon sur une commande du groupe International Airlines group (IAG), maison-mère de British Airways, Iberia, Aer Lingus, Vueling et LEVEL) mais rien n’a transpiré lors du Salon.
À la décharge de Bombardier, il faut dire que depuis la montée en puissance du salon de l’aviation d’affaires EBACE (European Business Aviation Convention & Exhibition) qui se tient tous les ans à Genève, petit frère du NBAA BACE (National Business Aviation Association Business Aviation Convention & Exhibition), il serait quasi-redondant d’aligner comme dans le passé sur le tarmac de l’aéroport du Bourget lors du Salon, des Learjet, des Challenger et des Global. Néanmoins, il est vrai que Dassault Aviation exhiba tous les membres la famille Falcon : 2000XLS, 900LX, 7X et 8X et Gulfstream Aerospace, de Savannah, en Georgie, trois de ses bireactés d’affaires haut de gamme : un SuperMidSize G280 construit à Tel Aviv en Israël par IAI et deux à très long rayon d’action construits à Savannah, les G500 en campagne de certification et G650.
De la même façon, Bombardier Aéronautique a éliminé le traditionnel repas de presse du dimanche soir, veille de l’ouverture du Salon qui était une occasion privilégiée pour les journalistes et les relationnistes de l’avionneur de maintenir une relation serrée. À la défense du constructeur de Saint-Laurent, ce dernier préfère commanditer l’Aerospace Media Dinner, tenu à l’Aéro Club de France durant lequel sont remis les prix du journalisme aérospatial mondial. Oublié par Bombardier, j’y fut heureusement invité par Adam Konowe représentant la Flight Safety Foundation (FSF) de Washington.
Le Salon du Bourget s’est ainsi ouvert cette année alors que Bombardier en plus de subir une disette prolongée de nouvelles commandes de CSeries doit affronter le géant aéronautique de Seattle, Boeing, qui a déposé une plainte devant l’International Trade Commission de l’US Department of Commerce. L’avionneur américain reproche à Bombardier d’avoir vendu au-dessous du prix coûtant, des CSeries CS100 et CS300 au transporteur américain Delta Air Lines en avril 2016 grâce aux aides et subventions abusives des gouvernements du Québec et du Canada et souhaite l’imposition par Washington, de tarifs douaniers sur les CSeries vendus aux États-Unis.
En conférence de presse, le dimanche 18 juin sur le coup de 15h00, à la Délégation générale du Québec à Paris, rue de Pergolèse, la ministre québécoise de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, Dominique Anglade, confirma que ses fonctionnaires avaient rempli le formulaire d’information exigé par l’US Department of Commerce afin de tenter de démontrer que le gouvernement du Québec n’avait nullement subventionné Bombardier, mais s’était simplement introduit au capital-actions de la CSeries. Une façon de jouer sur les mots, utilisée depuis quarante ans par un autre constructeur aéronautique non-américain.
Depuis octobre 2015, Bombardier a reçu près de 3,7 milliards de dollars américains des gouvernements du Québec et du Canada ainsi que de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ).
Rappelons qu’en février 2017, le gouvernement brésilien s’était tourné vers l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour dénoncer à son tour les aides accordées par Québec et Ottawa au programme CSeries qui entre en compétition avec les avions de transporteurs régional biréactés de 80 à 146 places, E-Jet et E-Jet E2 du l’avionneur de Sao José dos Campos.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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