LE BOURGET – 1304 nombre de mots – Temps de lecture : 5 minutes. Tous les grands salons aéronautiques, qu’il s’agisse du Salon du Bourget, de Farnborough International, de Bahreïn International, de Singapore Airshow, du NBAA BACE ou d’HAI Heli Expo, ont leur vedette et le Salon de l’aéronautique et de l’espace de Paris n’échappe pas à la règle.
Lors de l’édition 2015 du Salon du Bourget, le biréacté de cent places Bombardier CSeries CS100 vola la vedette des démonstrations en vol, le Lockheed Martin F-35 Lightning II ayant déclaré forfait. Pour l’édition 2017, le chasseur bombardier monoréacté de cinquième génération fut incontestablement la vedette incontestée pour cette première apparition publique sur le continent européen.
L’an dernier, deux F-35B, la version VSTOL commandée par l’US Marine Corps, survolèrent le salon Farnborough International, un des deux effectua un vol stationnaire devant la foule, avant de se poser sur la base aérienne RAF Fairford au Royaume-Uni.
Le 6 mai dernier, à peine deux semaines après que les responsables du F-35 Joint Programme Office aient déclaré que le F-35 n’apparaitrait pas au Salon du Bourget de cette année, sa venue était annoncée.
Deux jours plus tard, le chef d’état-major de l’US Air Force, le général David Goldfein, confirmait l’envoi sur le territoire français afin de participer au Salon du Bourget, de deux F-35A provenant de Hill AFB, dans l’Utah, la base hébergeant le premier escadron opérationnel de l’US Air Force. Au même moment, huit autres appareils provenant du même escadron seront en déploiement opérationnel en Europe, afin de participer à des exercices interalliés. Rappelons que le F-35A a été déclaré opérationnel (Initial Operational Capability IOC) en août 2016 par l’US Air Force et effectua son premier déploiement en Europe en avril 2017. Les deux F-35 devaient y effectuer des démonstrations en vol aux mains de pilotes d’essais de Lockheed Martin. Pour sa part, l’US Marine Corps après avoir octroyé au F-35B son ‘Initial Operational Capability’ (IOC) le 31 juillet 2015 à la base MCAS Yuma, en Arizona, a depuis janvier 2017, stationné de façon permanente, un premier escadron de F-35B hors des États-Unis, à la base MCAS Iwakuni, au Japon.
Déclaré vainqueur de la compétition Joint Strike Fighter (JSF) en mars 2001 face au Boeing X-32, le X-35 fut lancé en 1996. Devenu le F-35, le vol inaugural du premier appareil de production est survenu en 2007 des installations de Lockheed Martin de Fort Worth, au Texas. L’historique et gigantesque Plant 4 a produit depuis la seconde guerre mondiale plus de 10 000 avions dont les B-24 Liberator, B-36 Peacemaker, F-111 Aardvark et F-16 Fighting Falcon sous Consolidated Aircraft, General Dynamics Lockheed puis Lockheed Martin.
Déjà 220 F-35 ont été livrés et en 2019, 17 F-35 seront produits tous les mois à Fort Worth, sans compter ceux qui sortiront des chaines d’assemblage de Cameri, en Italie et de Nagoya, au Japon
Le Joint Strike Fighter est décliné en trois versions: le F-35A, le F-35B à décollage court et atterrissage vertical et un F-35C pour l’aéronavale.
L’US Air Force devrait recevoir plus de 1763 F-35A. L’US Navy, l’US Marine Corps 353 F-35B et 67 F-35C, l’US Navy, 260 F-35C.
À l’international, parmi les partenaires du programme JSF, le Royaume-Uni recevra 138 F-35B pour la Royal Navy, la Turquie, 100 F-35A, l’Italie, 90 F-35 dont 30 F-35B pour la Marina Militare et 60 F-35A pour la Aeronautica Militare, l’Australie, 72 F-35A, la Norvège, 52 F-35A, les Pays-Bas, 29 F-35A et le Danemark, 27 F-35A.
Par le biais des Foreign Military Sales (FMS), Israël acquerra au moins 50 F-35A destinés à Heyl Ha’avir, le Japon, 42 F-35A pour la Japan Air Self-Defense Force (JASDF) et la Corée du Sud, 40 F-35A pour la Republic of Korea Air Force.
La venue du F-35 au Salon du Bourget a pour but pour les responsables de Lockheed Martin et du F-35 Joint Fighter Office est de séduire de nouveaux clients européens, particulièrement la Belgique et la Finlande, et de faire oublier les problèmes techniques et financiers du Lightning II alors que ses performances en combat aérien rapproché ont parfois été jugées limitées.
Si Washington a refusé la vente du premier chasseur de supériorité aérienne furtif, le Lockheed Martin F-22A Raptor, à Israël et au Japon, en dépit de leur insistance, il en est tout autrement avec le F-35 qui, tout comme son prédécesseur, le Lockheed Martin (originellement General Dynamics) F-16 Falcon, compte sur les ventes à l’export comme le rappela Richard Aboulafia, Vice President of Analysis, Teal Group de Fairfax, en Virginie.
Au final, ce fut un F-35A qui toucha le tarmac de l’aéroport du Bourget (LBG). Il s’agit de la troisième présence d’un avion de combat furtif au Salon parisien. Lors de l’édition 1991, un Lockheed Martin F-117A Nighthawk, auréolé de sa participation lors de la Première guerre du Golfe fut exposé au statique alors que lors de celle de 1995, un NorthropGrimman B-2A Spirit se posa, gardant les moteurs allumés, le temps que l’équipage salut la foule avant de repartir.
Stationné au Department of Defense Coral derrière deux rangées de barrières, protégé par des policiers militaires américains lourdement armés, le F-35A était entouré d’un Boeing P-8A Poseidon, d’un Bell/Boeing MV-22 Osprey, d’un Lockheed Martin F-16 Fighting Falcon, d’un Boeing CH-47F Chinook, d’un Boeing AH-64D Apache et d’un Sikorsky UH-60 Black Hawk.
Du premier jour du Salon destiné aux professionnels au dernier jour grand public, le F-35 piloté par Billy Flynn, pilote d’essai senior des programmes F-16 et F-35 chez Lockheed Martin et ancien pilote au sein de l’Aviation royale canadienne, effectua vers 15h30 tous les jours, une démonstration en vol d’une durée de huit minutes, quatre minutes de moins que celle du Rafale de Dassault Aviation, donnée plus tôt dans l’après-midi.
Aux dires du pilote de Lockheed Martin, le F-35A par cette performance de huit minutes fut présenté comme jamais auparavant comme il l’expliqua en conférence de presse : ‘The F-35’s slow-speed maneuverability and the power of Pratt & Whitney’s 40,000-lb.-thrust engine were on full display, with the aircraft climbing vertically into the sky and gently falling into a controlled, 360-deg. pedal turn’.
Vidéo de la demonstration en vol: https://www.f35.com/news/detail/the-f-35-at-paris-air-show-2017
Il ajouta que contrairement à ses concurrents, le F-35 lors de la démonstration en vol est en configuration de combat, ses missiles et bombes étant dans la soute.
Il fut appuyé dans ses dires par le Lieutenant Colonel Scott Gunn du 33rd Fighter Wing de l’US Air Force qui expliqua par des tableaux chacune des manœuvres de la démonstration en vol quotidienne.
Le F-35 Lightning II de Lockheed Martin va rester longtemps le principal acteur du marché militaire mondial avec une position dominante incontestable et incontestée. Richard Aboulafia me rappela durant le Salon en précisant que le F-35 représentera, en valeur, 50,1% du marché mondial des avions de combat pour la période 2016-2025.
Même si les ministres canadien et québécois ont boudé le chalet de Lockheed Martin durant le dernier Salon du Bourget, le F-35 aura incontestablement dominé les présentations en vol mais aussi les conférences de presse des lundi et mardi matins.
Certes, il est vrai, que le F-35 a connu un développement long et parsemé de problèmes mais il marque un saut technologique par rapport à ses contemporains et concurrents dont plusieurs ont effectué leur vol inaugural dans les années 1990.
Il est éloquent de constater que les pays qui craignent pour leur sécurité et même parfois leur existence menacée, comme Israël, le Japon ou la Corée du Sud, ont opté pour le F-35. Cela est un gage de confiance envers cet avion de combat.
Ceci contraste avec d’autres pays qui prennent des années avant d’enfin porter leur choix sur un modèle en particulier et pour qui, l’achat d’avions de combat semble se limiter à des considérations de retombées industrielles et d’emplois locaux.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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