À la veille de son départ pour le salon de l’aviation de Farnborough, le ministre de l’Économie, de l’innovation et de l’exportation (MEIE), monsieur Jacques Daoust, affirme que sa priorité est la négociation d’une nouvelle entente avec Ottawa sur le financement des exportations d’avions. L’entente précédente est arrivée à échéance et le ministre accuse son prédécesseur d’en avoir négligé le renouvellement. Monsieur Daoust avait commencé ces négociations avant son congédiement comme président d’Investissement Québec par le gouvernement Marois. Le projet visait à constituer un portefeuille commun d’actifs regroupant les avions financés par Exportation et développement Canada (EDC) et ceux financés par Investissement Québec (IQ). Chacune des organisations assumerait le même niveau de risque en proportion du montant investies dans ce fond.
Il y a une dizaine d’années, Selon M. Daoust, Exportation et Développement Canada de même qu’Investissement Québec se sont partagé le financement des avions régionaux de Bombardier, les CRJ, mais de façon inégale. Le ministre responsable du MEIE explique qu’EDC, qui possédait une organisation beaucoup plus efficace qu’IQ, a pu se permettre de choisir les meilleurs dossiers, ceux qui étaient moins risqués et plus rentables alors qu’Investissement Québec a dû se contenter des moins bons dossiers, ceux des entreprises jugé trop risquées par EDC. L’organisme québécois a malgré tout financé des exportations d’avions régionaux totalisant quelque 2 milliards de dollars. Monsieur Daoust précise qu’« il n’y a pas eu de perte dans ça, mais on a eu de grands moments d’insécurité. (…) Ce qui explique qu’on n’a pas perdu d’argent, c’est qu’on a fait un montage financier complexe mais qui n’est plus permis (par les nouvelles règles de l’Organisation mondiale du commerce) ». Les règles en vigueur à l’époque permettaient aux banques de financer jusqu’à 100 % du coût d’achat d’un avion, une proportion qui a maintenant été réduite à 80 %; de plus ce montant doit être constitué d’une dette de premier rang, comme c’est le cas pour une hypothèque.
Si le gouvernement fédéral accepte la proposition du Québec, les deux partenaires créeraient un fond commun destiné au financement des exportations d’avions commerciaux et des règles communes régiraient ces financements. Les ventes avions d’affaires de leur côté ne sont habituellement pas financés par EDC ou IQ. Il y a quelques années, M. Daoust nous expliquait que si une entreprise a besoin d’aller voir un banquier pour financer l’achat d’un avion d’affaire, c’est habituellement le signe qu’elle n’a pas les moyens de se le payer. La seule exception pourrait être les compagnies de nolisement qui achètent des flottes d’avions d’affaire.
Monsieur Daoust estime que sa négociation avec le gouvernement fédéral se présente favorablement, sauf que rien n’oblige EDC à accepter ces propositions qui avantagent surtout le Québec: « EDC pourrait très bien s’en aller de son côté et le faire seul et faire ce qu’elle a toujours fait, aller chercher les meilleures compagnies, parce qu’elle a la machine internationale pour le faire, ce que nous n’avons pas au Québec; on est pas équipé pour faire de la collection internationale comme EDC peut le faire, et actuellement on est à finaliser une entente avec eux et on fera des annonces prochainement. »
Le ministre Daoust a rappelé la grande importance de l’industrie aérospatiale pour le Québec puisqu’elle génère 8,9 % des exportations du Québec, comparativement à 7,8 % pour l’aluminium. Dans ce contexte, on comprend facilement que monsieur Daoust estime que le CSeries deviendra la locomotive du secteur aérospatial au cours des prochaines années. Rappelons qu’en mars dernier, la direction de Bombardier affirmait devant un groupe d’investisseurs newyorkais que les ventes du CSeries permettront d’augmenter les revenus annuels de sa division Aéronautique de 5 à 8 milliards de dollars américains lorsque la production aura atteint son rythme de croisière.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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