Chez Bombardier, les dernières nouvelles sont mauvaises. Pire encore, même si ces nouvelles ne sont pas aussi catastrophiques que ce qu’en ont dit certains commentateurs, elles ont fait tomber l’action de catégorie B de Bombardier de 30 cents à 3,90 $, jeudi le 15 mai. La semaine a mal débuté, mardi, avec une déclaration de Bryan Bedford, président et chef de la direction de Republic Airlines, qui a révélé au magazine Flightglobal, qu’aucune décision ne serait prise au sujet de la commande de 40 CS300, passée par sa compagnie en 2010, avant deux ans. Du même souffle, il a précisé que « nous ne parlons pas d’annuler la commande », mais comme la première livraison ne se fera pas avant la deuxième moitié de 2016, monsieur Bedford estime qu’une décision sur l’usage qu’on fera de ces avions n’est pas urgente. Les CS300 de Republic étaient destinés à sa filiale Frontier Airlines qui a été revendue en décembre dernier après avoir enregistrée des pertes importantes. Monsieur Bedford, qui a visité les installations de Bombardier à Mirabel, s’est toutefois dit très impressionné par le nouvel avion.
Le lendemain, Calin Rovinescu, président et chef de la direction d’Air Canada, a confirmé, en marge de l’assemblée annuelle de sa compagnie, que toute décision concernant le remplacement des 25 dernier Embraer 190 du transporteur était reportée « de plusieurs années ». Ces avions sont relativement récents puisque le plus ancien n’a que 10 ans. Au dire de M. Rovinescu, ils seraient encore très efficaces et très appréciés par la clientèle. Cette décision permettra aussi de réduire les dépenses d’investissement et de limiter le niveau d’endettement d’Air Canada. À plus long terme, ces avions de même que 25 Airbus A319 seront remplacés et monsieur Rovinescu ne ferme pas la porte au CSeries. Il est certain que Bombardier a besoin de nouvelles meilleures que celles-là pour remonter le moral de ses troupes et rassurer ses investisseurs. Depuis le début de l’année, le CSeries a obtenu 20 commandes fermes et 11 options d’achat, toutes pour le CS300, ce qui est insuffisant pour garnir convenablement le carnet de commandes. L’usine du CSeries, qui est en construction à Mirabel, pourra produire 120 appareils par année et elle pourrait accueillir une deuxième ligne d’assemblage qui porterait la capacité de production totale à 240 avions par année. Le rythme des ventes doit donc s’accélérer. Mais combien de CSeries Bombardier doit-il vendre à chaque année? On peut faire le calcul suivant. Le prix officiel du CS100 est de 63 millions de dollars américains et celui du CS300 grimpe à 72 millions. En supposant que Bombardier vende 70 CS300 et 30 CS100 par année, les revenus théoriques se chiffreraient à 6,930 millions. Malheureusement les escomptes accordés aux acheteurs réduisent considérablement ce montant. Dans l’industrie, le montant de ces escomptes continue d’être un secret aussi bien gardé que celui de la furtivité des nouveaux avions de chasse. Si on évalue ces escompte à 25 % en moyenne, mais certains prétendent qu’ils sont beaucoup plus élevés, les revenus additionnels de Bombardier se chiffreraient à 5,198 millions de dollars américains. En mars dernier, le président de Bombardier, Pierre Beaudoin, a justement affirmé devant un groupe d’investisseurs et d’analystes américains, réunis à New York, que le CSerie permettra à Bombardier aéronautique d’accroître ses revenus de 5 à 8 milliards de dollars par année d’ici 5 ans. Pour atteindre cet objectif, Bombardier doit donc vendre de 100 à 150 CSeries…chaque année! Or Bombardier en est encore très loin. Bien sûr, les livraisons ne débuteront que dans 12 à 18 mois et les relationnistes de l’entreprise feront sans doute valoir que la mise en service du CS100 suscitera une accélération du rythme des ventes. Espérons que c’est ce qui se produira. Daniel.H.Bordeleau@infoaeroquebec.net
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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