MONTRÉAL – Nombre de mots : 992 – Temps de lecture : 6 minutes.
Dans un texte de Claude Lafrenière publié dans la section ‘Aviation Québec’ de Facebook, j’ai appris à ma grande stupéfaction que la Sûreté du Québec aurait passée commande d’un hélicoptère biturbine franco-germano-espagnol Airbus H145 d’occasion et non pas usagé.
Nous nous souviendrons que jusqu’à l’écrasement d’un de ses Bell 206 en janvier 2020 au Lac Saint-Jean, la police provinciale du Québec alignait deux Bell 206 et un Bell 412, tous assemblés aux installations de l’hélicoptériste texan Bell Helicopter Textron, à Mirabel, à quarante kilomètres au nord de Montréal.
Rappelons que depuis son établissement en 1986, plus de 3000 hélicoptères ont été assemblés dans cette unité de production de Mirabel, qui est devenue le centre de l’hélicoptériste texan Bell Helicopter en matière d’hélicoptères civils.  Au fil des ans et de la conjoncture du marché des hélicoptères civils, entre 1000 et peu plus de 2000 employés ont trouvé emploi dans ces installations sans compter de nombreux autres emplois chez les sous-traitants.
Contrairement aux installations d’Airbus Helicopters, anciennement Eurocopter, au Canada, à Fort Érié, en Ontario ou aux États-Unis, à Grand Prairie, au Texas et à Columbus, au Mississipi dont le mandat se résume à assembler des kits venus d’Europe, celles de Bell Helicopter à Mirabel, réalisent la conception, le développement, les tests en vol, la fabrication des parties en composite et la construction des hélicoptères Model 505, 206, 206-L, 212, 230, 407, 412, 427, 429 et 430 au fil des années.
À un moment où le gouvernement du Québec, le premier ministre François Legault en tête, nous serine à longueur de journée avec ‘l’achat chez nous’ et le lancement du ‘Panier Bleu’, il fait un pied de nez aux ingénieurs, techniciens et ouvriers de production de Bell Helicopter et de ses fournisseurs au Québec en optant pour un hélicoptère Airbus. Rien de moins!
Le ridicule en politique n’est pas nouveau et depuis quelques années nous pouvons affirmer que nous sommes bien servis. Il suffit de penser aux agissements du gouvernement Libéral de Philippe Couillard dans le dossier de Bombardier et du CSeries et de ses successifs ministres de l’industrie, le regretté Jacques Daoust et Dominique Anglade, maintenant chef du Parti Libéral du Québec qui après avoir renfloué d’argent public Bombardier, ont donné le programme CSeries et ses installations à Airbus.
Avec le gouvernement de la Coalition Avenir Québec de François Legault et son Panier Bleu, c’est ‘fait ce que je dis mais ne fais pas ce que je fais’. Il semble plus viser dans sa campagne d’achat local, les ‘pauvres’ salades de Californie et oignons de Georgie qu’autre chose.
Mais si ce n’était que le Panier bleu. Mais peut-on s’attendre à plus d’un gouvernement dans la plupart des limousines des ministres sont autres que des GM, Ford ou Chrysler construites au Canada. Le Premier Ministre se déplace lui-même en Toyota Siena.
Hydro-Québec, société d’état favorise depuis très longtemps les hélicoptères d’Eurocopter puis d’Airbus Helicopters au détriment de ceux de Bell Helicopter Textron.
Allez donc chercher la logique surtout de gouvernements qui se sont toujours drapés dans le fleurdelisé.
Si la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) a opté pour des hélicoptères d’Airbus ainsi que certains autres corps policiers municipaux et provinciaux canadiens, aucun machine de Bell Helicopter ne vole au service de l’État français. Que cela soit au sein de l’Aviation légère de l’Armée de terre, de la Marine Nationale, de la Gendarmerie, de la Police Nationale ou de la Police aux frontières. Il n’y a pas plus d’ailleurs de Sikorsky Aircraft ou Boeing ou MD Helicopters ou Robinson Helicopters au service des organismes de l’État français.
Qui plus est, ces achats de l’État français sont effectués sans appel d’offre, ce qui permet à Airbus Helicopters et antérieurement Eurocopter et Aérospatiale de rafler la manne à leurs propres conditions financières.
L’État français a financé le développent du nouveau H160 d’Airbus en plus d’en commander un bon nombre, naturellement sans appel d’offre, dans le cadre du plan de sauvetage de l’industrie aérospatiale française. Et ni Québec, ni Ottawa, n’ont osé dire un mot. Quel contraste avec le déversement de fiel contre Boeing au moment du différend entre le constructeur numéro un au monde et Bombardier sur la question d’une commande de CSeries par l’Américaine Delta Air Lines obtenue à la suite d’un prix inférieur au coût de production.
Je me demande où est la logique depuis le grand Love In du 16 octobre 2017 au Sheraton Centre-ville de Montréal et du lendemain aux installations de Bombardier à Mirabel, entre le pdg de Bombardier de l’époque, Alain Bellemare et celui d’Airbus du moment, Tom Enders qui allait se traduire par le don du programme CSeries de Bombardier à Airbus, renfloué à coup de milliards de dollars par les contribuables du Québec, accompagné de celui de la chaîne d’assemblage du CSeries à Mobile, en Alabama.
Depuis environ cinq ans, Airbus Canada a de grandes ambitions qui me furent dévoilées lors du Salon CANSEC de 2016 qui est de placer les produits Airbus auprès du ministère de la défense nationale : le Typhoon en remplacement du F-18 Hornet; l’A330MRTT en remplacement du CC-150 Polaris; un concept flou encore au stade de la planche à dessin d’un A320 en version de patrouilleur maritime en remplacement du CP-140 (P-3 Orion) et la fourniture des MilComSat. Le but d’Airbus et de Paris est de prendre la place de Boeing et Lockheed Martin auprès du Ministère de la défense nationale.
Airbus a de l’appétit au Canada, encouragé par le choix par Air Transat de son A321neoLR au détriment du Boeing 737MAX.
L’omni présence des gens d’Airbus et des représentants français de l’aérospatial provenant de l’industrie et du gouvernement est évident depuis trois ans.  Ils sont les invités d’honneur des évènements d’AéroMontréal et de l’Association des industries aérospatiales canadiennes (AIAC). Imaginez le grenouillage au niveau des officines gouvernementales.  C’est nul autre que le patron d’Airbus Canada qui s’est exprimé en juin 2020 pour plaider en faveur d’une aide du gouvernement fédéral canadien en faveur du secteur aérospatial canadien. De toute évidence, Airbus est en territoire conquis.
L’achat, sans appel d’offre’ par le gouvernement du Québec d’un Airbus Helicopters H145 en est l’effrayante preuve.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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