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Dans un article du journaliste Julien Arsenault dans le quotidien La Presse de Montréal du 5 août 2021, nous apprenons, sans surprise pour moi, que l’hélicoptériste européen Airbus Helicopters se déclarait surpris que le gouvernement du Québec ait l’intention d’acquérir, de gré à gré, soit sans appel d’offres, deux hélicoptères de Bell Helicopter Textron Canada.
Construits à Mirabel, au nord de Montréal par la filiale de l’Américaine Bell Helicopter Textron de Fort Worth, au Texas, les deux hélicoptères Model 412 seront destinés à l’usage de la Sureté du Québec.
Le culot et Airbus sont quasi synonymes, l’histoire du constructeur européen en fait franco-germano-espagnol, fondé, à l’origine, dans le but unique de défaire l’hégémonie sur le marché des avions de ligne des constructeurs américains Boeing, Douglas et Lockheed à coups de centaines de milliards de dollars d’aides, subventions et contrats publics donnés sans appel d’offres, le démontre depuis 1970.
Airbus va même jusqu’à demander une chance de soumissioner. Mais Québec ne doit en aucun cas céder devant cette masquarade.
Eh bien, les responsables d’Airbus Helicopters que j’ai connu pendant 25 ans lors des salons aéronautiques et lors de visites de leurs installations semblent avoir la mémoire courte. Mais pour avoir suivi le consortium franco-espagno-germanique depuis sa conception en 1970, je ne suis nullement surpris.
Comment les dirigeants d’Airbus Helicopters peuvent-ils avoir le culot de se plaindre d’une démarche qui a été la marque de commerce de l’hélicoptèriste européen depuis sa conception.
Si nous analysons la nomenclature de la flotte d’hélicoptères en service au sein du Ministère de la défense de France : celle de l’Aviation lègère de l’Armée de terre ou ALAT, de l’Armée de l’Air et de la Marine Nationale, il ressort que toutes les voilures tournantes sont signées Airbus Helicopters ou de ses prédecesseurs, Eurocopter et Aérospatiale. Pas un seul Bell Helicopter Textron, Sikorsky Aircraft, Boeing Vertol, MD Helicopters ou Robinson Helicopters.
L’analyse des flottes de la Gendarmerie Nationale, de la Police Nationale, de la Police des Frontières donne exactement le même résultat.
Les produits de Bell Helicopter, Sikorsky Aircraft, Boeing, MD Helicopters et Robinson Helicopters seraient-ils si nuls ou simplement que les constructeurs américains ne seraient jamais invités à soumissionner.
La réponse est que l’État francais aussi bien pour ses achats d’hélicoptères que d’avions s’entend de gré à gré avec ses fournisseurs nationaux exclusifs : Airbus Defense & Security, Airbus Helicopters, Dassault Aviation.
Ne comptez pas sur la France pour un processus d’acquisition par appels d’offres.
Tous les avions de combat de l’Armée de l’Air et de la Marine Nationale proviennent de chez Dassault Aviation.
Tous les avions de transport de l’Armée de l’Air sortent des ateliers d’Airbus.
Tous les avions de transport VIP de l’Armée de l’Air et du gouvernement francais sont signés Dassault Falcon et Airbus Corporate Jets.
L’Armée de l’Air vient d’acquérir une flotte de douze ravitailleurs en vol sans appel d’offres, le contrat ayant été donné d’office à Airbus pour son A330MRTT que malheureusment le Canada a choisi en mystérieusement éliminant le Boeing KC-46A Pegasus choisis par l’US Air Force, la force aérienne d’Israël Heyl Ha Avir et de celle du Japon, la Japan Air Self-Defense Force.
Et c’est Airbus qui veut faire la leçon au Québec ?
D’ailleurs, il y a plusieurs années lors d’un AHS Forum à Virginia Beach, le patron de la filiale d’American Eurocopter, le prédecesseur d’Airbus Helicopters USA, se plaignait de la soit-disant fermeture du marché militaire et para-public américains aux hélicoptères de son entreprise. Je pris alors la parole pour lui rappeler que les US Coast Guard avaient acquis 96 HH-65, une version du Dauphin de l’Aérospatiale, ancetre d’Eurocopter, et l’US Army, plus de 400 UH-72A Lakota, version militarisée du H145 d’Airbus Helicopters. Même la NASA, symbole de la suprématie technologique des États-Unis, transporte ses astronautes dans trois H135. Et qu’aucun hélicoptère de Bell, Sikorsky, Boeing, MD ou Robinson ne portait la cocarde bleu blanc rouge de la France. Il resta sans argument et sans voix.
Le culot d’Airbus est sans limite et le Québec en a déjà suffisememnt fait les frais.
Car après avoir obtenu le CSeries pour pas un sou, Airbus a tenté de faire réduire sa facture de taxes foncières de ses installations à Mirabel, puis à profiter de la PCU pour payer son personnel. Non satisfait d’avoir obtenu le contrat des tankers de la RCAF sans appel d’offres, Airbus réclamera bientôt de l’argent des gouvernements canadien et québécois pour développer une version rallongée du CSeries devenu l’Airbus A220
Le culot et la manipulation sont des armes d’Airbus mais personne n’est obligé d’y succomber.
Ne comptons pas sur les députés de l’opposition à Québec, ceux du Parti Libéral du Québec qui alors au pouvoir, avaient orchestré le don du programme CSeries à Airbus, ni au milieu associatif aérospatial qui semble très bien s’entendre comme larrons en foire avec Airbus et le reste de l’industrie aérospatiale francaise.
Il est temps pour le Québec d’avoir le courage de remettre Airbus à sa place.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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