MONTRÉAL – Depuis maintenant trois jours, la rumeur divulguée par le quotidien américain The Wall Street Journal de la si attendue commande de CSeries de Bombardier par Delta Airlines a été reprise par tous les grands organes de presse qui porterait sur 75 CS300 fermes assortis de 50 options.
Vendredi, l’agence Bloomberg nous que Bombardier aurait rejeté la première proposition d’aide de l’ordre d’un milliard de dollars de la part du gouvernement fédéral canadien de Justin Trudeau.
Générosité ou simple tactique de la part de l’avionneur québécois ?
De toute évidence, cette grandeur de cœur de Bombardier relève plus de la tactique et ce pour deux raisons évidentes.
D’une part, il faut se douter que la famille Bombardier – Beaudoin n’est nullement intéressée par une refonte de la structure de l’actionnariat de la société qui abolirait les actions à vote multiples détenues exclusivement par les membres de la famille Bombardier – Beaudoin qui leur permet de contrôler l’entreprise même s’ils ne possèdent qu’une minorité des actions de celle-ci.
Mouvement tactique car Bombardier sait très bien que le Québec Inc., son ‘porte–parole’ Michel Nadeau, directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques, et la plupart des élus et des chroniqueurs de la Belle province soutiennent les actions à vote multiples qui préserveraient l’avionneur québécois de passer sous le contrôle d’une entreprise ou d’un fonds d’investissements non-québécois pour ne pas dire américain. Il s’agirait d’un bluff, car Bombardier espère que le fédéral cèderait finalement sur cette exigence. Néanmoins, toute entente semblerait illusoire d’ici l’assemblée générale des actionnaires de Bombardier qui se tiendra, certainement en grandes pompes, le 29 avril prochain aux installations de l’avionneur à Mirabel où sont assemblés les CRJ et les CSeries.
D’autre part, refuser momentanément l’offre de subvention du fédéral, donnerait à Bombardier une virginité face aux membres du Congrès à Washington excédés par les aides publiques aux concurrents de Boeing, le temps de conclure la commande de Delta Airlines qui, sans aucun doute, est essentielle au succès du CSeries.
Échaudé par les centaines de milliards versés depuis le début des années 1970 par la France, l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume-Uni et la Communauté économique européenne à l’Européenne Airbus qui ont en fait un redoutable concurrent de Boeing, Washington reste vigilant.
En prime, si jamais Bombardier maintenait son refus d’accepter l’aide fédérale en dépit de bonification, elle enlèverait une épine au pied de Justin Trudeau dont le gouvernement est pris en étau entre le Québec et le reste du Canada qui n’apprécie guère ce ‘cadeau’ à la Belle province.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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