Le 12 novembre dernier, l’US Defense Security Cooperation Agency (DSCA) notifiait le Congrès américain de sa demande d’acquisition de quatre Boeing C-17 Globemaster III supplémentaires par l’Australie, d’une valeur approximative de 1,6 milliard de dollars américains.
Éxécuté par le biais du programme ‘Foreign Military Sales’, cet achat porterait la flotte de la Royal Australian Air Force (RAAF) à dix C-17 soit la seconde plus importante au monde après celle de l’U.S. Air Force.
En production depuis 1991 dans une usine construite spécialement pour lui à l’aéroport de Long Beach, en Californie, en face des usines historiques de la Douglas Aircraft maintenant vides, le C-17 a vu son carnet de commandes fondre depuis la fin des commandes de l’USAF et l’épuisement des ventes internationales.
La production du C-17 devant se terminer à la mi-2015, soit quelques mois plus tôt qu’annoncé antérieurement, Boeing a construit une dizaine de ‘White Tails’ disponibles dans un court délai. De la commande à la livraison d’un C-17, il s’écoule environ deux ans et dix mois.
Depuis ma dernière visite aux installations du C-17 en 2008, les représentants de Boeing ont parcouru le monde afin de proposer le C-17 aux clients actuels du C-17 : Royaume-Uni, Australie, Canada, Inde, Koweït, Qatar et Émirat arabes unis; aux alliés traditionnels dont le Japon, la Corée du sud et Israël n’ayant pas encore opté pour le Globemaster III mais aussi auprès de clients potentiels inattendus dont l’Arabie Saoudite et l’Algérie.
Après le Royaume-Uni, c’est maintenant au tour de l’Australie de décider d’augmenter sa flotte de C-17.
Pendant ce temps-là , la rumeur court à Ottawa que le Ministère de la défense nationale serait intéressé par l’acquisition d’un C-17.
Déjà en 2013, l’Air Force Association of Canada ou l’Association des Forces Aériennes du Canada soutenait l’acquisition d’un C-17 supplémentaire.
Maintenant, le Canada devrait saisir l’occasion d’acquérir des C-17 supplémentaires avant que la chaine d’assemblage ne ferme à jamais. Actuellement, le Canada possède quatre Boeing C-17, le seul avion de transport militaire stratégique occidental. En fait aucun autre appareil de transport y compris l’Airbus A400M ne s’en approche question capacité d’emport, rayon d’action, largeur et hauteur de la soute, vitesse, fiabilité et rapport performances prix.
Avec l’achat de C-17 additionnels, le Canada pourrait accroître son soutien aux interventions de l’OTAN, aux grandes opérations humanitaires en plus assurer la souveraineté du Canada dans l’Arctique et réduire grandement son recours à l’affrètement d’avions cargos étrangers et particulièrement russes, coûteux, pas toujours disponibles et une source possible d’indiscrétions.
Moins spectaculaires que les mastodontes que sont les Lockheed C-5 Galaxy, Antonov An-124 Ruslan et An-225 Mriya, le quadriréacteur à fuselage large et aile haute,Boeing C-17 Globemaster III, est devenu la référence en matière de transport stratégique.
Depuis son entrée en service au sein de l’U.S. Air Force en 1995, le Globemaster III demeure le seul avion de transport militaire capable de transporter aussi bien des troupes que des charges volumineuses sur de longues distances, directement jusqu’aux zones d’opérations grâce à une capacité exceptionnelle d’opérer à partir de pistes courtes non-aménagées.
Conçu pour répondre aux besoins spécifiques de l’US Air Force, le premier C-17 de production fut livré le 14 juillet 1993 au 17th Airlift Squadron basé à Charleston AFB, en Caroline du sud et son 223ième et dernier fut livré le 12 septembre 2013.
Royal Air Force
En mai 2000, le Royaume-Uni devint le premier client international du quadriréacté en optant pour quatre C-17 destinés à la Royal Air Force puis d’un cinquième appareil en août 2006 et d’un sixième en juillet 2007.
La RAF prit possession de son premier C-17, le 17 mai 2001 et de son sixième, le 11 juin 2008, tous attachés à la base de Brize Norton à 80 km à l’ouest de Londres.
Le 18 décembre 2009, Boeing confirma la commande d’un septième C-17 remis le 16 novembre 2010, d’un huitième en février 2012 et d’un neuvième en novembre 2013.
Royal Australian Air Force
Afin de répondre aux besoins de projection de ses forces armées, le gouvernement australien, en mars 2006, passa commande de trois C-17 accompagnée d’une option pour la base de Amberley dans le Queensland. Le premier Globemaster III fut réceptionné par la Royal Australian Air Force le 29 novembre 2006 et le dernier le 19 janvier 2008.
Le 3 octobre dernier, le gouvernement australien approuva l’achat de deux à quatre C-17.
Le 21 juillet 2008, Boeing annonçait la signature passée avec le gouvernement du Qatar d’une entente portant sur l’achat d’un nombre indéterminé de C-17 livrables durant l’été 2009 dont quatre furent finalement livrés.
En février 2009, les Émirats arabes unis passaient commande de quatre Globamaster III.
Dans le cadre d’un accord semblable à celui qui mena à l’achat en commun de Boeing E3 Sentry AWACS, le NATO Strategic Airlift Capability, douze pays de l’Otan, se sont entendus à la fin de septembre 2008 pour s’équiper de trois C-17. Le premier fut livré par l’USAF dès juillet 2009 et les deux suivants directement du constructeur en septembre et octobre de la même année 2009.
En septembre 2010, le Koweït commandait un premier C-17 puis un second en avril 2013.
En janvier 2013, l’Inde réceptionna le premier de dix C-17 commandés en juin 2011.
La Force aérienne du Canada
Dès 2002, dans ce contexte fut mis sur pied, le ‘Canadian Forces Future Strategic Airlifter Project’ pour étudier des solutions afin de moderniser les capacités de transport aérien des Forces canadiennes.
Le 29 juin 2006 fut communiqué le plan d’acquisition de quatre avions de transport stratégique et de 17 avions de transport tactique, au montant de 8,3 milliards de dollars.
Le ministère de la Défense nationale fera l’acquisition de quatre avions de transport stratégique pour amener rapidement un grand nombre de passagers ou une importante quantité de matériel sur de longues distances, dont l’Équipe d’intervention en cas de catastrophe (DART). Le coût total estimé de l’acquisition des quatre appareils sera de 1,8 milliard de dollars.
Le premier appareil devrait être livré 18 mois après l’attribution du contrat et le dernier au plus tard 48 mois.
À cette époque, au chapitre du transport aérien stratégique, le Canada ne disposait que de ses CC?150 Polaris, des Airbus A310 modifiés, limités en raison de leur capacité restreinte de transport et par leur besoin de pistes aménagées et d’équipement pour le chargement et le déchargement.
Seul le Boeing C-17 répondait aux exigences, l’Airbus A400M dont les premières livraisons ne se réalisèrent pas avant 2013, n’était alors qu’’un avion de papier’.
Le 2 février 2007, le ministre de la Défense nationale annonçait la signature d’un contrat avec Boeing pour la livraison du premier des quatre C-17 au début du mois d’août ou de septembre de la même année. L’accord incluait l’achat de 18 réacteurs Pratt & Whitney F117-PW-100, quatre suites de contremesures infrarouges LAIRCM et 20 lunettes de vision nocturnes AN/AVS-9.
Les C-17 canadiens portent la désignation CC?177Globemaster III, ‘CC’ pour ‘Canadien’ et ’Cargo/Transport’, sont les 177ième, 180ième, 186ième et 187ième construits et affichent les immatriculations 177701 à 177704.
Le 4 avril 2007 marqua à l’usine de Long Beach, le ‘wing mating’ de ‘Canada Un’, le premier C-17 destiné au Canada. Le 16 juin, il sortait de la chaîne de montage pour le hangar de peinture.
Ainsi un nouveau chapitre de l’histoire de l’aviation militaire s’ouvrait, le 23 juillet 2007 avec le vol inaugural de ‘Canada Un’.
Le 11 août suivant marqua l’arrivée du premier C-17 au Canada, le ‘177701’ par sa visite au spectacle aérien d’Abbotsford.  Le lendemain, il intégrait pour la première fois sa base en se posant à CFB Trenton à Belleville, en Ontario.
Le 18 octobre 2007, le second C17 canadien rejoignait la base de Trenton tandis que le 26 mars et le 3 avril 2008 Boeing remettait respectivement le troisième et le quatrième CC-177 Globemaster III à la Force aérienne.
Dix-huit mois après la signature du contrat d’acquisition de ces quatre avions, les Forces armées canadiennes disposaient maintenant d’un moyen indépendant de déplacer de l’équipement lourd de façon rapide, fiable et polyvalente sur de grandes distances afin de répondre à des situations de crises nationales ou internationales.
De toute évidence, pour le Canada, c’est le moment où jamais d’augmenter sa flotte de Boeing C-17 dont l’utilité et la fiabilité au sein de l’Aviation royale canadienne n’ont plus besoin d’être soulignées.
Bientôt se terminera la production des C-17 à Long Beach, en Californie et elle ne reprendra jamais. La sélection, le développement et la mise en service de son remplaçant ne sont pas envisageables dans un futur rapproché même si Boeing et Lockheed ont laissé filtrer des esquisses d’avions à fuselage intégré ou Blended Wing Body (BWB).
Une étude intéressante de l’Air Force Institute of Technology’ basé à Wright-Patterson Air Force Base en Ohio intitulée ‘AMC’s Future Strategic Airlifter: The Blended Wing Boy?’ publiée en juin 2010 met en lumière les avantages d’un avion de transport stratégique à fuselage intégré par rapport au C-17.
Des C-17 supplémentaires pour le Canada : c’est maintenant ou jamais. Et de toute évidence, maintenant serait beaucoup mieux.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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