MONTRÉAL – Nombre de mots : 760 – Temps de lecture : 3 minutes. Le 13 décembre 2017, le deuxième transporteur aérien aux États-Unis ainsi qu’au monde, en termes de revenus, passait commande, sans grande surprise, de cent Airbus A321neoLR pour un montant de 12,7 milliards de dollars au prix catalogue et prenait des options sur cent A321neoLR additionnels au détriment du géant aérospatial américain Boeing et de son 737MAX10.
Les livraisons de ces avions, équipés de moteurs de la famille Pure Power de Pratt & Whitney, tout comme le C Series, s’étaleront de 2020 à 2023.
D’une capacité pouvant atteindre 197 places, ces A321neoLR, dernière déclinaison de la famille A320 dont le vol inaugural remonte au 22 février 1987, devraient consommer 12% moins de kérosène que les A321ceo.
Certains verront dans cette commande de 100 A321neoLR, le prix à payer pour l’avionneur Boeing pour sa bataille contre Bombardier et son C Series dont Delta Air Lines a commandé ferme 75 exemplaires assortis de 75 options.
C’est là faire abstraction de l’histoire des achats de Delta Air Line ces dernières années.
Rares sont ceux qui se souviennent que dans les années 1990, au grand dam d’Airbus, Delta Air Lines avait signé une clause d’exclusivité avec Boeing pour une période de dix ans. Sur une flotte de plus de 300 avions de ligne, le transporteur d’Atlanta ne comptait qu’une douzaine d’A310 dont il se débarrassera rapidement en 1995 après les avoir acquis en 1992.
En 1990 la flotte de Delta Air Lines était constituée de 343 aéronefs dont 260 Boeing (727, 737, 757, 767), 44 Douglas (DC-8, DC-9), 23 Lockheed (L-1011) et 39 McDonnell Douglas (MD-11, MD-82, MD-88).
Dix ans plus tard, en 2000, sur un total de 724 jets, elle comptait 426 Boeing (727,737,757,767,777), 47 Lockheed (L-1011) et 151 McDonnell Douglas (MD-11, MD-88, MD-90) et toujours plus aucun Airbus.
Les choses changèrent lors de la fusion de Delta Air Lines avec le transporteur aérien d’Eagan, en banlieue de Minneapolis-St. Paul, au Minnesota, Northwest Airlines en 2009 qui avait cédé aux charmes d’Airbus en 1986. Au moment de la fusion, Nortwest Airlines alignait déjà sur un total de 303 avions de ligne, 158 Airbus (A319, A320, A330) mais plus que 77 Boeing (747, 757) et 68 McDonnell Douglas (DC-9).
Depuis sa fusion avec Northwest Airlines, le profil des achats de Delta Air Lines est méconnaissable.
Le 4 septembre 2013, Delta Air Lines passera commande auprès de l’avionneur franco-germano-espagnol Airbus de 10 A330-300 et de 30 A321 puis le 2 juin suivant de 15 A321 supplémentaires.
Le 20 novembre, le transporteur d’Atlanta acquerra 25 Airbus A350-900 et 25 A330-900neo afin de remplacer respectivement, d’une part ses 747-400 et 767-300ER sur les lignes internationales et, d’autre part, ses 767-300ER sur les dessertes transcontinentales.
Le 27 novembre 2016, Delta Air Lines annulera la commande de Nortwest Airlines portant sur 18 Boeing 787-8 après avoir, en 2010, reporté sa propre commande de 787-8 afin de l’annuler en 2011. En échange de cette annulation, Delta Air Line devra acheter 100 737-900ER.
Finalement, le 14 décembre 2017, Delta Air Lines plaça une commande ferme de 100 Airbus A321neoLR, assortie de la prise de 100 options.
Ainsi en date du 16 décembre 2017, Delta Air Lines aligne 852 avions de ligne dont 197 Airbus (A319, A320, A321, A330, A350), 484 Boeing (717, 737, 757, 767, 777) et 171 McDonnell Douglas (MD-88, MD-90).
Toutefois au chapitre des commandes, l’avionneur européen occupe toute la place, Airbus comptant 236 commandes fermes (A321ceo, A321neo, A330-900neo, A350) et Bombardier, 75 (CS100, CS300) auprès du transporteur d’Atlanta et Boeing, seulement 42 (737-900ER) obtenues en compensation de l’annulation d’une commande de 787-8.
Néanmoins, il faut remettre les choses en perspectives. Bien que Boeing aurait apprécié décrocher cette commande de Delta Air Lines, la perte de la vente de 100 ou 200 737MAX10 représente de deux à quatre mois de production aux installations de Boeing à Renton, dans l’état de Washington. Sur le marché des biréactés monocouloirs, Boeing affiche un carnet de commandes au 30 novembre 2017 de quelque 4489 737 dont plus de 4016 737MAX. Actuellement 47 Boeing 737 sortent tous les mois des ateliers de Renton et ce chiffre sera porté à 52 en 2018 et 57 en 2019.
Bien que ce ‘revers’ de Boeing fasse plaisir à bien des gens, il s’inscrit dans un mouvement amorcé au moment de la fusion entre Delta Air Lines et Northwest Airlines donc bien avant les démêlés de Bombardier avec Boeing.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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