Pour son CSeries, Bombardier a choisi des matériaux de dernière génération afin de proposer un monocouloir résolument plus léger. Le fuselage emploie l’aluminium-lithium et la voilure les composites à base de fibre de carbone. Dans ce dernier cas, le procédé de fabrication est particulièrement innovant.
Le CSeries est le premier avion de sa catégorie – 100 à 150 places – à atteindre la barre des 50 % de matériaux composites (un chiffre déjà diffusé mais que Bombardier refuse aujourd’hui de confirmer). Il vole ainsi avec des ailes tout-composites, à l’exception des nervures. Avec la fibre de carbone, « il s’agit de bâtir une structure équivalente mais plus légère », rappelle un porte-parole.
Cette technologie participe donc à la réduction de la consommation de carburant, estimée à 20 % par rapports aux concurrents Airbus, Boeing et Embraer. De plus, la résistance à la corrosion permet d’éloigner les interventions de maintenance. D’autres éléments majeurs sont faits du même matériau, comme les nacelles des moteurs, le cône de queue, la gouverne de profondeur et le plan horizontal de l’empennage.
Dans son usine de Belfast, en Irlande du Nord, Bombardier met en Å“uvre une nouvelle technique de production pour la voilure. Il s’agit du « transfert de résine par infusion » (resin transfer infusion, RTI), à base de fibres sèches. Or les autres voilures en composites sont faites à partir de pré-imprégnés, des tissus déjà enduits de résine.
Dans le cas du CSeries, il s’agit en outre de fibres non tissées. Cette superposition de couches unidirectionnelles a des avantages sur les tissages habituels. Les fibres restent rectilignes et conservent donc mieux leurs propriétés. Elles peuvent être intrinsèquement allégées tout en étant 20 à 30 % plus résistantes.
Avec le procédé RTI, la résine arrive sous pression dans les fibres placées dans d’immenses moules à la taille des panneaux supérieur et inférieur, longerons, lisses et raidisseurs. Après le démoulage, ces éléments sont collés ensemble. L’absence de rivets ou autres fixations simplifie considérablement l’ensemble. Du coup, moins d’inspections sont requises. Et la surface est plus lisse, d’où une meilleure aérodynamique.
Les nervures sont les seules pièces métalliques importantes de l’aile. En effet, les métaux sont mieux adaptés à certaines pièces dont le « chargement » en forces est complexe, multidirectionnel. Ainsi, les nervures, dans la structure de l’aile, doivent supporter des pressions d’origine aérodynamique, porter les moteurs et subir des torsions. D’où le choix d’un alliage d’aluminium.
Pour le fuselage, Bombardier a choisi l’aluminium-lithium. « Le CSeries effectuera huit à dix vols par jour, ce qui multiplie le risque de dégâts causés par des véhicules au sol : l’aluminium-lithium est plus facile à réparer que les composites », explique le porte-parole.
Le Canadien se fournit chez Constellium. Ce spécialiste des alliages a créé de nouvelles recettes, avec aussi du cuivre, de l’argent, du manganèse, du zirconium et d’autres ingrédients. A l’usine Constellium d’Issoire (France), on assure que les alliages Airware sont plus légers et plus résistants que ceux de la génération précédente. Pour des caractéristiques mécaniques données, une pièce peut être plus mince, d’où un gain en masse pouvant aller jusqu’à 25 % par rapport aux alliages classiques.
En fait, ce sont plusieurs formulations et procédés de fabrication qui sont disponibles. En jouant sur les proportions, on aboutit aux propriétés correspondant au produit demandé. Celles-ci diffèrent, suivant qu’il s’agit d’une nervure, d’un panneau de fuselage ou d’un longeron. Bombardier a ainsi choisi pour son CSeries une formulation relativement dure, adaptée à des panneaux de fuselage.
Le nouvel alliage se veut même plus compatible avec les matériaux composites : jusqu’ici, juxtaposer de l’aluminium et des composites était source de corrosion.
Thierry Dubois
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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