MONTRÉAL – Nombre de mots : 993 – Temps de lecture : 4 minutes. L’hélicoptériste suisse Kopter qui annonça lors de la grande messe de l’hélicoptère qu’est le Salon HAI Heli Expo, qui s’est tenu cette année au début mars à Atlanta, en Georgie, peut remercier le gouvernement Couillard, doit une fière chandelle au gouvernement Libéral de Philippe Couillard.
En tout premier lieu, rappelons que l’entreprise suisse Kopter a été fondée en 2007 sous le nom de Marenco Swisshelicopterpour Martin Engineering and Consulting, par Martin Stucki, un ingénieur suisse, afin de développer et construire le SKYe SH-9, un monoturbine de 7 places de 2,5 tonnes. En janvier 2018, la compagnie adoptait le nom de Kopter, et rebaptisait son premier hélicoptère, le SH09 laissant tombant le préfixeSKY-e.
Au printemps 2016, le gouvernement du Québec dirigé par le premier ministre Libéral, Philippe Couillard a convaincu Bell Helicopter Texton Canada, filiale du conglomérat texan Textron, dont les installations sont situées à Saint-Janvier de Mirabel, à 40km au nord de Montréal, de fermer sa toute nouvelle usine située dans l’état de Louisiane, dans le sud des États-Unis, destinée à la production de son nouveau Bell 505 pour l’installer à ses ateliers de Mirabel.
Rappelons qu’avec le soutien du gouvernement local, la direction de Bell Helicopter Textron avait décidé d’établir à l’aéroport régional de Lafayette, en Louisiane, créant du même coup 150 emplois, la chaîne d’assemblage de son tout nouveau monoturbine léger de cinq places, le Bell 505 Jet Ranger X lancé en grande pompe le 24 février 2014 au Salon Heli Expo 2014 tenu à Anaheim, en Californie. D’une surface de de 82000 pieds carrés, cette usine avait été inaugurée en août 2015 et aucun Bell 505 n’y sera produit en dépit de l’installation de tout l’outillage qui aura pris le chemin de Mirabel dès le mois de mai 2016.
Le vol inaugural du Bell 505 aura lieu le 11 novembre 2014 aux installations de Mirabel. Après l’arrêt de production en 2010 du Bell 206B construit à plus de 8400 exemplaires depuis 1967 et devant le succès du monomoteur à turbine R66 de la californienne Robinson Helicopter, lancé en 2007 lors d’HAI Heli Expo à Orlando, en Floride, la direction de Bell Helicopter décida de revenir sur le marché d’entrée de gamme avec le Bell 505.
Suite à l’intervention du gouvernement Couillard et de sa ministre de l’Économie, de la science et de l’innovation et ministre responsable de la stratégie numérique du Québec, Dominique Anglade, Bell Helicopter Textron fit marche arrière. Un grand évènement médiatique fut même tenu, le jeudi 19 mai 2016, aux installations québécoises de l’hélicoptériste texan. Interrogé sur les ‘incitatifs financiers’ octroyés à Bell Helicopter Textron par le gouvernement du Québec, la Ministre resta muette.
Néanmoins Dominique Anglade confirma que la délocalisation de la chaîne d’assemblage du Bell 505 de la Louisiane vers le Québec découlait de la modification des conditions du prêt de 56 millions de dollars consentis à Bell Helicopter Textron Canada. Elle permettra de consolider les quelques 950 emplois actuels et d’en créer une centaine de nouveau.
Maintenant à la conquête du marché nord-américain, Kopter ne pouvait trouver mieux que les installations vides de Lafayette devenues vides en août dernier par les actions du gouvernement Libéral de Philippe Couillard. L’hélicoptériste suisse va ainsi louer ces installations d’une surface de 84,700 pieds carrés et du même coup bénéficier d’exemptions de taxes et de 2,5 millions de dollars de subventions à condition de créer 120 emplois et de générer une masse salariale annuelle de sept millions de dollars.
Grâce au génie de Dominique Anglade, l’installation en Amérique du nord d’un concurrent direct de Bell Helicopter a été grandement facilitée.
Car le SH09 dont le vol inaugural du prototype eut lieu en novembre 2014, sera le tout premier nouvel hélicoptère léger monoturbine de 2,5 tonnes depuis une vingtaine d’années. Propulsé par une turbine Honeywell HTS900, le SH09 affrontera l’Airbus H125 Ecureuil/AStar et l’Airbus H130 et le Bell Helicopter Model 407 construit à Mirabel, au Québec. Mais il s’attaquera aussi au marché des biturbines légers et des Airbus H135, Airbus H145, Leonardo AW109 et Bell Helicopter Model 429 produits aux installations québécoises de Bell Helicopter. Sa certification est prévue en Europe pour 2020, suivi par celle des autorités américaines. Il est prévu que le SH09 sera certifié pour le vol aux instruments IFR en 2022 afin d’attirer les opérateurs d’hélicoptères sanitaires.
Ce nouveau joueur en plus de pénétrer le marché civil nord-américain, le plus important au monde aura aussi accès au gigantesque marché militaire américain sans oublier celui des agences gouvernementales, des corps de police municipaux à l’US Department of Homeland Security. Déjà plus de 400 UH-72A Lakota, des Airbus Helicopter EC-145 militarisés ont remplacé autant d’hélicoptères conçus et construits par Bell Helicopter au sein de l’US Army.
Kopter prévoit amorcer la production de son SH09 dès 2020 à quelques mois de la certification prévue pour le second trimestre 2020 par European Aviation Safety Agency (EASA) and FAA certification et en produire une centaine par année dès 2025. Le constructeur suisse s’est déjà assuré de ventes représentant deux années et demi de production dont la moitié destinée au marché américain.
Les installations de Louisiane assureront les livraisons pour les États-Unis et le Canada et éventuellement l’Amérique latine et tout comme les installations d’Airbus Helicopters en Amérique du Nord, assembleront les machines à partir de kits venus d’Europe, dans le cas de Kopter de ses installations de Mollis, en Suisse.
Les dirigeants de Kopter peuvent ainsi remercier le gouvernement Couillard pour lui avoir, certes indirectement, offert une usine d’assemblage flambant neuve en terre américaine quasi-clef en main.
Le gouvernement Couillard ne s’arrêtera pas là , en donnant, un peu plus d’un an plus tard, au constructeur franco-germano-espagnol Airbus, le C Series après y avoir investi dans ce programme de biréacté de cent places, d’une façon ou d’une autre, trois milliards de dollars américains.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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