MONTRÉAL – 1533 mots – Temps de lecture : 6 minutes.Dans un rapport du Sénat canadien, un groupe de sénateurs canadiens dénonce l’acquisition envisagée par le gouvernement fédéral Libéral de Justin Trudeau de dix-huit avions de combat Boeing F-18E/F Super Hornet. Pour ces membres de la Chambre haute, ce plan est une ‘political decision’ qui faillit à répondre aux besoins des militaires et des contribuables.
En novembre dernier, le gouvernement de Justin Trudeau, élu en octobre 2015, a rendu public sa décision d’acquérir dix-huit Super Hornet dans l’attente d’une décision finale quant au choix du remplaçant définitif des 77 F-18 Hornet encore en service des 138 livrés entre 1982 et 1988, un processus de sélection qui devrait s’étaler sur pas moins de cinq ans.
Promesse électorale oblige, l’actuel gouvernement Libéral met à l’écart, au moins temporairement, le jet de cinquième génération Lockheed Martin F-35 Lightning II, bien que le Canada joignît le programme Joint Strike Fighter (JSF) en 2007 en tant que ‘Level 3 Participant’ au même titre que l’Australie, la Norvège, le Danemark et la Turquie, sous le gouvernement Libéral de Jean Chrétien. En 2010, le gouvernement Conservateur du premier ministre Steven Harper annonça l’achat de 65 F-35 sans appel d’offres dont le premier exemplaire aurait été livré en 2015.
Dans son rapport intitulé ‘Reinvesting in the Canadian Armed Forces: a plan for the future’ rendu public au mois de mai 2017, le Comité sénatorial juge coûteux l’acquisition des Super Hornet et affirme même qu’ils limiteront la possibilités pour l’Aviation royale canadienne (ARC) de collaborer pleinement avec les avions du NORAD et de l’OTAN. En reprenant les arguments contenus dans une lettre de treize officiers supérieurs à la retraite de l’ARC, le Comité relève que les F-18 Hornet ont peu en commun avec les Super Hornet
Le rapport ne peut être plus claire en soulignant que ‘The government’s decision not to proceed with the procurement process for a new fighter fleet and purchasing an unnecessary and costly interim capability will leave the taxpayers with a significant burden and (Royal Canadian Air Force RCAF) with a duplicate support system that will cost billions of dollars in equipment, training, and technical know-how’. Il va meme jusqu’à offrir une solution: ‘This burden would be eliminated if the government were to move forward with the selection of the F-35’.
En conclusion, il en appelle au gouvernement fédéral d’immédiatement lancer une compétition visant au remplacement des F-18 avec pour objectif le dévoilement d’un vainqueur pour le 30 juin 2018.
En fait, le gouvernement Trudeau n’a rien inventé. En optant pour le F-18E/F, le Canada marcherait simplement dans les pas de  l’Australie qui bien qu’elle se joignait au Joint Strike Fighter dès juin 2002 pour assurer la relève de ses McDonnell Douglas F-18, passa commande en mai 2007 de 24 Boeing F-18E/F Super Hornet pour remplacer ses General Dynamics F-111 Aadvark puis de 12 EF-18G Growler en mai 2013 sans, pour autant, tourner le dos au F-35 dont elle souhaite, à terme, acquérir 100 exemplaires.
En octobre 1981, l’Australie opta pour le biracté McDonnell Douglas F-18 Hornet de préférence au monoréacté General Dynamics F-16 Fightning Falcon, un gage de sécurité afin de survoler le vaste territoire national quasi-désert et les immenses étendues d’eau qui l’entourent. Les 57 F-18A et 18 F-18B entrèrent en service au sein de la Royal Australian Air Force entre 1980 et 1990.
Mais il se peut que les sénateurs aient raison lorsqu’ils prétendent que le Canada ne pourrait maintenir deux flottes d’avions de combat. En tout cas, Richard Aboulafia, Vice President, Analysis, Teal Group de Fairfax, en Virginie l’affirme : ‘It’s just a matter of numbers. Adding a new fighter type means high up-front costs–training, logistics, etc. If you have 130 planes fielded, as Australia plans, then having two types is fine. But Canada’s plan calls for half that number, and the up-front costs for 18 jets (assuming 18+47) are too high’.
Premièrement, les Sénateurs devraient se renseigner sur le cas de l’Australie qui a déjà réceptionné ses deux premiers F-35A basés à Luke AFB, au Nevada ainsi que quatre pilotes de la Royal Australian Air Force pour formation. Au début avril, les deux Lightning II s’échappèrent pour participer au Avalon Air Show. D’ici 2020, 26 autres F-35A devraient être livré et la totalité des 72 aéronefs commandés fermes d’ici 2023
Déterminer les raisons qui ont poussé l’Australie à recourir en dépit de leur importante commande de F-35A, au F-18E/F.
Comment les deux flottes sont-elles coexister ?
Le cas de l’Australie est peut-être différent de celui du Canada par le nombre de F-35A envisagés mais aussi car les autorités australiennes sentent leur pays menacé par certains voisins. Ils craignent que leur vaste et riche territoire, peu peuplé soit convoité par des voisins moins riches, disposant de plus petits territoires déjà surpeuplés. Ceci amena ce pays à s’équiper dans les années 1970 du coûteux chasseur bombardier lourd General Dynamics F-111 Aardvark et de mettre la main sur un certain nombre de FB-111, sa version bombardier, lors de leur désactivation de l’US Air Force au milieu des années 1990.
Deuxièmement, les sénateurs devraient aussi déterminer le niveau de ‘commonality entre les F-18A/B/C/D dont le vol inaugural du premier F-18A remonte au 18 novembre 1978 et le F-18E/F Super Hornet dont le prototype a pris son envol le 29 novembre 1995.  Mais surtout constater comment la RAAF aborde cette question et la gère. Savoir dans quelle proportion, les militaires australiens utilisent les pièces de rechange et appliquent la formation et les procédures de maintenance des F-18A/B Hornet aux F-18E/F Super Hornet et EA-18G Growler.
Certains pourront avancer que dans le passé, l’Aviation royale  canadienne a bien dans la passé, maintenu parallèlement deux ou trois flottes d’avions de combat : dans les années 1970 et 1980, les Lockheed F-104 Starfighter, les McDonnell Douglas F-101 Voodoo et les Northrop F-5 Freedom Fighter et dans les années 1990, les McDonnell Douglas F-18 Hornet et les Northrop F-5 Freedom Fighter.
Mais Pour Richard Aboulafia ‘The Super Hornet and Hornet don’t have much in common’.
Pour cela, les sénateurs doivent recourir à des experts indépendants au service de firmes internationales de consultation afin de donner tout crédit à cette démarche et d’en retirer toute partisannerie politique qui existe au Sénat en dépit du soi-disant non alignement politique des membres de la Chambre haute ainsi que chez les retraités de l’Aviation royale canadienne. Ces experts dont certains seront des pilotes, des ingénieurs, des anciens membres de forces armées autres que canadiennes pourront par leur analyse répondre à ces questions essentielles afin de juger de la pertinence de cet achat intérimaire de 18 F-18E/F Super Hornet.
Troisièmement, le comité du Sénat devrait se pencher sur le processus d’acquisition de matériel volant par les Forces armées canadiennes. Bien que ses vicissitudes semblent dépendre du parti au pouvoir. Tout le monde se souvient de l’aventure du programme d’acquisition des hélicoptères de recherche et de sauvetage qui s’éternisa jusqu’à l’achat des CH-149 Cormoran en 1994 puis celle de l’aéronef de recherche et de sauvetage a voilure fixe (ARCVF-FWSAR) qui se termina avec le choix de l’Airbus C295 l’an dernier après une douzaine d’années de pérégrinations. Il faut dire que ces deux achats se firent sous un régime Libéral. À l’opposé, au début des années 2010, le gouvernement Conservateur de Stephen Harper a agi avec célérité lors des achats des Boeing C-17 Globemaster III, Lockheed Martin C-130J Hercules et Boeing CH-47F Chinook qui furent livrés sans retard et, même dans certains cas, en avance et, de surcroit, à l’intérieur des budgets prévus.
Bien que le remplacement des Lockheed CF-104 Starfighter par les présents CF-18 sous le règne de Pierre-Elliot Trudeau fut un exercice long et pénible, rien n’oblige Justin Trudeau à suivre les pas de son père.
Surtout que selon toujours le même Comité du Sénat, la liste d’achat de matériel volant de l’Aviation royale canadienne est longue.
L’ARC doit voir ce qu’elle fera des neuf AgustaWestland VH-71A dérivés de l’AW101 acquis des États-Unis pour les pièces. La possibilité de remettre en état de voler quatre exemplaires est envisagée par les militaires canadiens.
Mais il y a encore plus urgent dont le remplacement des avions de transport stratégiques et de ravitaillement en vol Airbus CC-150 Polaris, des Airbus A310 acquis par Wardair puis repris par Canadian International avant d’être acquis par les Forces armées canadiennes et transformé en tanker au début des années 1990.
Le choix d’un remplaçant aux avions de patrouille maritime Lockheed CP-140 Aurora doit se faire en 2025 afin que les livraisons puissent s’étaler
2026-2036 ainsi que la sélection d’un drone ou UAV (Unmanned Aerial Vehicle) avant la fin de 2018.
Alors que le ministre de la défense Harjit Singh Sajjan en appelle à la modernisation des AgustaWestland CH-149 Cormorant ainsi que des Bell Helicopter CH-146 Griffons, le Comité sénatorial recommande de ne garder que 40 Griffon, remplacer les autres par des hélicoptères de transport plus lourds du type Sikorsky UH-60 Black Hawk et d’acquérir 24 hélicoptères d’attaques du type Boeing AH-64 Apache.
Il préconise aussi de porter le nombre de CH-47F de 15 à 36.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
Bonjour monsieur,
J’aime bien la vivacité et l’abondance de détails dans vos articles.
Deux suggestions : écrivez en français ou bien écrivez en anglais. Le chevauchement de phases françaises entrecoupées de phrases ou de citations en anglais est d’un agacement mortel. (Vous pourriez à tout le moins traduire ce que vous rapportez dans une langue étrangère.)
Ensuite, je vous recommande de passer vos textes dans le logiciel Antidote (ou tout autre correcteur d’orthographe) avant de les publier. Ça donnera à vos textes un air plus professionnel.
Merci de votre immense intérêt pour l’aéronautique d’ici.