OTTAWA, ONTARIO – Au deuxième jour de l’édition 2016 u Sommet de l’aérospatiale canadienne, Lockheed Martin invita les journalistes présents à une conférence de presse sur le coup de 11h00.
L’occasion fut la signature d’une entente entre le PDG de Straightline, Mark Dorey, une entreprise dont le siège social est au Royaume-Uni et ayant également des bureaux à New York et Los Angeles, cofondé par une équipe de dirigeants des secteurs de l’aviation et de l’aéronautique dans le seul but de lancer un service de dirigeables hybrides et le président exécutif du conseil de Minéraux rares Quest, Pierre Lortie, une minière canadienne visant à devenir un producteur intégré d’oxydes d’éléments de terres rares, et un acteur important dans la chaîne mondiale d’approvisionnement de métaux de terres rares essentiels à la fabrication de nombreux produits industriels et électroniques.
Par cette entente, Straightline Aviation fournira à Quest, des services de transport aérien pour acheminer le concentré de minerai, les fournitures et le personnel à bord de dirigeables hybrides LMH-1 fabriqués par Lockheed Martin aux installations du constructeur à Palmdale, en Californie où furent construits dans le passé, entres autres, les gros porteurs commerciaux L-1011 TriStar.
À compter de 2019, les sept dirigeables hybrides assureront la navette entre Schefferville relié au port de Sept-ÃŽles par une voie ferrée et la mine au Lac Strange, dans le nord du Québec afin de transporter d’abord l’équipement et les fournitures requis pour la construction de la mine. Une fois la production amorcée, ils transporteront environ 200 000 tonnes de concentré de minerai par année
Cette entente de services d’une valeur d’environ 850 millions de dollars américains, incluant les coûts du carburant, sur une période de 10 ans à partir de 2019, avec des prolongations allant jusqu’à 20 ans, couvre l’exploitation d’une flotte de sept dirigeables hybrides de transport LMH-1. D’ailleurs, Straighline Aviation a commandé en mars 2016 auprès d’Hybrid Enterprises d’Atlanta, en Georgie, le distributeur exclusif depuis 2014 du LMH-1, douze dirigeables LMH-1 au coût de 480 millions américains.
Le LMH-1.
Les origines du dirigeable Lockheed Martin LMH-1 remontent au Lockheed Martin P-791, un dirigeable hybride expérimental dont le vol inaugural remonte au 31 janvier 2006 aux installations de tests en vol du constructeur au Plant 42 de l’US Air Force à Palmale, en Californie.
Conçu pour répondre à la compétition de l’US Army pour un Long Endurance Multi-Intelligence Vehicle (LEMV), le P-791 verra NorthropGrumman avec son HAV-3 lui ravir le contrat. Le P-791 fut alors modifié pour répondre aux besoins de transport du marché civil sous le nom de SkyTug.
Le LMH-1 est un dirigeable hybride d’une longueur de 280 pieds (85,3m), capable de transporter une charge de 47 000 livres (21318 kg) et jusqu’à dix-neuf passagers sur une distance de 1400NM (2592km) à la vitesse de croisière de 60knts (111km/h). Il devrait entrer en service en 2018 et être le premier membre d’une famille de dirigeables hybrides capables d’ici 2020 de soulever jusqu’à 500 tonnes.
Lors du Salon du Bourget de 2015, Lockheed Martin divulgua que tous les exigences nécessaires à la certification du LMH-1 avaient été remplies.
Aux dires de son constructeur, le LMH-1 est bien adapté aux défis que présente l’accès isolé du site minier de Quest situé dans le Nord du Québec de par sa capacité d’atterrir sur pratiquement n’importe quelle surface, y compris la neige, la glace, le gravier et même l’eau, sans le recours à des pistes ou tout autre coûteuses infrastructure.
Les dirigeables hybrides comme le LMH-1 combinent la technologie des aéronefs plus légers que l’air, les avions, les hélicoptères et les aéroglisseurs. Ainsi l‘hélium fournit 80 pour cent de la portance du dirigeable, tandis que le reste provient de la forme aérodynamique de l’aéronef et de la poussée vectorielle de ses quatre moteurs. Le dirigeable est doté de l’unique ‘Air Cushion Landing System’ basé sur la technologie des coussins d’air des aéroglisseurs qui facilite l’atterrissage et agrippe fermement le dirigeable au sol.
Le LMH-1 représente une solution de transport économique et respectueuse de l’environnement car il est non seulement conçu pour consommer moins de carburant, émettre moins de dioxyde de carbone et produire moins de bruit que les avions conventionnels mais aussi il ne nécessite pas d’infrastructure coûteuse au sol, évitant ainsi un impact sur l’habitat faunique comparativement au transport routier par camion.
Néanmoins, bien des incertitudes planent sur ce projet.
En tout premier lieu, l’ouverture de la mine elle-même et son exploitation sont incertaines. En développement depuis plusieurs années, ce projet de Quest d’une valeur d’un milliard de dollars n’a pas encore obtenu le feu vert des autorités gouvernementales, ni de celui des autochtones alors que son financement reste incomplet.
En second lieu, la certification du LMH-1 n’est pas chose faite, le seul prototype du LMH-1 ayant volé il y a une dizaine d’années.
En dernier lieu, le Québec n’en est pas à ses premiers projets de dirigeables destinés à l’exploitation du Grand nord de la province. En grandes pompes lors du Salon de Farnborough de 2014, la firme américaine LTA Aerostructures annonça son installation au Québec au prix d’un investissement de 90 millions de dollars. L’entreprise qui a ouvert des bureaux à Montréal planche actuellement sur la mise au point de deux dirigeables qui seraient tous deux assemblés au Québec: le LTAA-1 d’une capacité de 10 tonnes et le LTAA-70, capable de transporter 70 tonnes. Depuis, elle a donné deux présentations de son projet, une première fois au Colloque aérotechnique tenu à l’École nationale d’aérotechnique (ÉNA) en mars 2015 et une seconde lors du Symposium sur le marché canadien de la défense et de la sécurité organisé par Aéro Montréal, en octobre de la même année.
Selon les informations contenues sur le site internet de LTA Aerostructures, un site manufacturier de soixante millions de dollars devrait être construit à Mirabel pour une entrée en activité en 2017. Environ 60 ingénieurs devraient être engagés au cours de la prochaine année. D’ici 2029, la direction de l’entreprise prévoient que les activités manufacturières et opérationnelles de LTAA créeront plus de 6000 emplois.
Mais pour l’instant, tout reste spéculatif.
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
Un super scoop!
Comment se fait-il que l’on n’en parle nulle part :
« Les terres rares du Plan Nord seront transportées par des dirigeables de Lockheed Martin».