Le programme de certification du CS100 est maintenant complété à 85%. Les essais pour déterminer les niveaux de bruit des moteurs sont maintenant exécutés et ils ont confirmé que le CSeries est l’avion le plus silencieux de sa catégorie. La dernière partie du programme de certification consistera à simuler un fonctionnement commercial normal et à vérifier la fiabilité de l’avion. Pour ces essais, les CS100 effectueront des liaisons entre plusieurs aéroports nord-américains. À moins d’un imprévu, le programme de certification sera terminé avant la fin de l’année et le client de lancement, Swiss Air, pourra mettre son premier CS100 en service d’ici le milieu de 2016.
Même si tout va bien dans le ciel, les ventes du CSeries demeurent bloquées à 243 commandes fermes. De passage à Toronto il y a quelques jours, Fred Cromer, le président de Bombardier Avions commerciaux, affirmait que la présentation du CSeries au Salon du Bourget avait suscité un énorme intérêt et que son personnel était très occupé. Entretemps la concurrence demeure féroce. Nous vous présentons un tour d’horizon des avions que le CSeries affronte.
Airbus, Boeing et Embraer
Les monocouloirs Airbus A319 et Boeing 737 Max 7 sont les concurrents directs des CSeries. Cette concurrence vise surtout le CS300 puisque Boeing et Airbus ne fabriquent plus d’avions de la taille du CS100.
Dimensions des cabines | ||
Dimensions en mètres | Largeur de la cabine | Hauteur du couloir |
Avions de ligne
Bombardier CS100 et CS300
Airbus A319, A320 et A321
Boeing 737 Max 7, Max 8, Max 9
Sukhoi Superjet 100 Irkut MC-21 Comac C919 |
3,28
3,70
3,53
3,20
3,82
3,90
|
2,11
2,13
2,20
2.12
n.d.
2.25
|
Avions régionaux
Bombardier CRJ 900 et 1000 Embraer E190-E2 et E195-E2 |
2,57
2,74
|
1,89
2,00
|
Comac ARJ-21-700 et 900
Mitsubishi MRJ |
3,14
2,76
|
2,03
2,03
|
La guerre commerciale que se livrent les trois avionneurs porte donc essentiellement sur le marché des avions de 120 à 160 places. En configuration régulière de deux classes de passagers, le Boeing 737 Max 7 pourra transporter 126 passagers, l’Airbus A319 en emportera 124 et le Bombardier CS300 en accueillera 135. L’Embraer E195-E2 peut quant à lui transporter 120 passagers, mais il s’agit d’un avion régional, contrairement au CSeries,qui est un avion de ligne.
La largeur des fuselages
La caractéristique la plus importante de ces avions dits monocouloirs, c’est le diamètre de leur fuselage. Plus le fuselage est large, plus les voyageurs le percevront comme confortable. C’est d’ailleurs la principale différence, avec la distance franchissable, entre les avions régionaux et les avions de ligne. Les avions régionaux comportent habituellement des rangées de 4 sièges en classe régulières comme c’est le cas de l’Embraer E195-E2, alors que les avions de lignes offrent des rangées de cinq sièges comme c’est le cas des CSeries ou de six sièges comme l’Airbus A320 et le Boeing 737.
L’espace intérieur des avions offrant des rangées de cinq ou six sièges est plus vaste et plus agréable. Les avions à fuselage étroit, offrant des rangées de seulement 4 sièges, donnent à certains voyageurs claustrophobes l’impression d’être enfermés dans un long tube étroit. L’analogie la plus appropriée serait la comparaison entre un autobus scolaire et un autobus interurbain. Les deux peuvent vous amener de Montréal à Toronto à la même vitesse, mais le trajet en autobus scolaire vous semblera beaucoup plus long…
Embraer contre le CS100 de Bombardier
Dans le cas du transport régional, le choix pourra s’effectuer entre le CS100 et les deux avions d’Embraer, l’E190-E2 et l’E195-E2. Toutefois, même s’ils transportent sensiblement le même nombre de passagers (de 110 à 120 sièges), l’Embraer E195-E2 et le CS100 sont des avions très différents. L’Embraer E195-E2 est plus long que le Bombardier. Le CS100 ; est plus large, plus haut et plus lourd que l’Embraer. L’E190-E2 ne compte pour sa part que 95 sièges.
Les Embraer seront propulsés par les nouveaux moteurs Pratt & Withney PW1900G qui utilisent la même technologie de turbosoufflante à réducteur que les moteurs de la CSeries. Ils sont silencieux et peu gourmands en carburant. De nouvelles ailes vont améliorer l’aérodynamisme des «E2», ce qui leur permettra de réduire encore plus leur consommation de carburant. Les livraisons de l’Embraer E190-E2 devrait débuter en 2018 et celles l’E195-E2 un an plus tard. Ces deux avions ont accumulés 167 commandes fermes.
Le Superjet 100 venu de Russie
Le Superjet 100, conçu et fabriqué par l’avionneur Sukhoi civil aircraft, une filiale du groupe russe United Aircraft corp (UAC), a été le premier concurrent du CS100 à prendre son envol en 2008. Il possède un fuselage de 3,2 mètres de large, ce qui permet des rangées de 5 sièges. Cet avion est offert en deux versions, une de 68 places et une autre de 86 places, en configuration deux classes. En classe unique, le plus gros des deux avions peut transporter 103 passagers. De futures versions allongées du Superjet pourront transporter jusqu’à 130 passagers. La compagnie arménienne Armavia a été la première à le mettre en service en 2011. Depuis cette date Sukhoi a livré une centaine de Superjet. Le faible niveau de production, 30 à 35 avions par année seulement, et une fiabilité incertaine constituent les principaux problèmes du Sukhoi superjet 100.
Le Irkut MC-21 et le CS300
Le MC-21 est un ambitieux monocouloir fabriqué par l’entreprise Irkut, un autre membre du consortium russe United Aircraft Corporation (UAC). Cet avion aurait dû voler en 2014 et être certifié en 2016, mais il est en retard. Le premier vol est maintenant prévu pour 2016. Son atout principal est un fuselage dont la largeur est de 3,82 mètres, 12 centimètres de plus que celui des Airbus A320, 29 centimètres de plus que celui des Boeing 737 et 54 centimètres de plus que le CS300.
Les autres caractéristiques de l’avion sont à la fine pointe de la technologie : moteurs Pratt&Withney PW1400G, ailes en composite hors autoclave, etc. Irkut a prévu trois versions, (MC-21-200, MC-21-300 et MC-21-400), dont la capacité variera entre 150 et 212 passagers.
Le MC-21 s’est vendu principalement en Russie et Irkut affirme avoir reçu 175 commandes fermes. Sur papier, il s’agit d’un concurrent formidable, mais il devra faire mieux que le Superjet 100 en termes de fiabilité. De plus, Irkut, tout comme Sukhoi, devra convaincre les compagnies occidentales que l’entreprise peut fournir un excellent service après-vente. Le rythme de production devra aussi être plus rapide que celui de Sukhoi jusqu’à maintenant. À titre de comparaison, Airbus et Boeing fabriquent une quarantaine de monocouloirs par mois, contre une vingtaine pour le Sukhoi Superjet…
Le Comac C919 chinois et l’éventuel CS500
La Chine représenté par la Commercial Aircraft corporation of China (Comac) a également de grandes ambitions qui s’incarnent notamment dans le C919. Depuis 2012, Bombardier s’est engagé à aider Comac à mettre le C919 au point. L’idée est de faire du C919 et du CSeries des avions complémentaires pouvant être exploités facilement par un même transporteur. L’objectif est de développer des aspects communs aux deux avions, notamment le cockpit. Bombardier aidera également Comac à faire certifier son avion en occident ; la compagnie collaborera à la vente, au marketing et au service après-vente. L’avionneur montréalais semble estimer que le C919 ne sera pas en mesure de livrer une véritable concurrence à un éventuel avion de 150 places, un CS500, qu’il pourrait décider de lancer dans l’avenir. Lors du dernier salon du Bourget, les deux partenaires ont toutefois été très silencieux au sujet de cette entente.
Le C919 offrira le fuselage le plus large (3,90 m) et le plus haut (2,25 m) de tous les monocouloirs. Il pourra transporter de 158 à 174 passagers selon les configurations. L’avion sera construit principalement en aluminium-lithium. L’avion sera lourd puisque les matériaux composites ne compteront que pour 20 % de son poids, comparativement à 46% dans le cas du CSeries. Comac a choisi les moteurs Leap 1C fabriqués par le consortium CFM International pour propulser son C919; ce sont des moteurs similaires à ceux des nouveaux Boeing 737 Max.
La route à parcourir pour le C919 pourrait être longue et ardue si on en juge par les déboires de l’autre appareil développé par Comac, l’avion régional ARJ-21. La conception de cet avion de 70 à 95 places selon les versions, a été lancée en 2002 et le premier décollage a eu lieu en 2008. Les essais en vol ont toutefois fait apparaître de nombreux problèmes dont un surplus de poids, l’avionique et le train d’atterrissage. La certification chinoise vient d’être obtenue, neuf années après la date initialement prévue.
La japonaise Mitsubishi
Le dernier joueur important dans ce tableau est la compagnie Mitsubishi et son avion régional MRJ en concurrence avec le CS100 et surtout les deux Embraer. La cabine de cet avion reprend les dimensions des E-Jets d’Embraer. Les deux avionneurs utilisent des moteurs de la famille Pure Power, de type turbosoufflante à réducteur, fabriqués par Pratt & Withney. Le développement de l’avion a toutefois pris trois ans de retard et le premier vol est prévu pour la fin du mois d’octobre de cette année. Mitsubishi a enregistré 223 commandes fermes pour le MRJ.
L’avionneur Mitsubishi s’est surtout spécialisé dans la fabrication sous licence d’avions militaires d’origine américaine qu’elle modifiait. Ces avions étaient uniquement vendus au gouvernement japonais, car la constitution du pays interdit l’exportation d’armements. Mitsubishi n’a pas fabriqué beaucoup d’avions civils, uniquement de petits turbopropulseurs comme les MU-2, qui ne pouvaient transporter qu’une douzaine de passagers. Par contre la compagnie de Nagoya fabrique de nombreuses composantes pour plusieurs appareils fabriqués par Boeing.
Les avionneurs chinois et russes sont principalement des fabricants d’avions militaires, étroitement liés à leurs gouvernements qui définissent leurs priorités et contrôlent étroitement leurs finances. Pour réussir dans le marché des avions commerciaux, ces compagnies devront convaincre les transporteurs aériens qu’elles peuvent fournir à la fois d’excellents avions et une qualité de service aussi bonne que celle des compagnies occidentales qu’elles aspirent à concurrencer. Restent comme véritables concurrents de Bombardier, Boeing et Airbus, qui possèdent une arme redoutable : une taille gigantesque qui leur permet d’offrir des prix imbattables sur des avions déjà amortis.
Après des études en science politique à l’Université du Québec à Montréal et à l’Institut d’études politiques de Paris, Daniel Bordeleau a entamé une carrière de journaliste qui s’étale sur plus de 35 ans. Il a travaillé principalement pour la Société Radio-Canada où il est d
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