Séville, Espagne  –  A Séville, dans le sud de l’Espagne, les halls de montage vivent au rythme des sous-ensemble d’A400M « Atlas » en provenance de toute l’Europe. Environ 500 personnes travaillent sur l’A400M et 500 autres sur les programmes Casa 295 et MRTT (A330 de ravitaillement en vol et de transport stratégique). « Avec l’A400M, notre préoccupation est aujourd’hui de faire face à la montée en cadence et de trouver des clients export » explique Domingo Urena, directeur de l’activité avions militaires au sein de la division Airbus Defence and Space. Et sur ces deux points, Domingo Urena, qui rencontrait les journalistes de l’Association française des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE), se veut aussi optimiste que volontariste.
L’industrialisation de l’A400M se traduit aujourd’hui par la présence dans l’usine de Seville d’une dizaine d’avions de série en cours d’assemblage : du MSN10 (trois vols d’essais déjà effectués en préalable à sa phase de réception par l’armée de l’Air qui débute) au MSN21 dont les premiers composants viennent d’arriver en Espagne. Sur le parking extérieur, le MSN9 attend depuis maintenant deux mois que son client turc vienne en prendre possession. Officiellement, l’armée de l’air turque n’est pas prête pour réceptionner l’appareil. Officieusement, le problème serait plutôt financier… « Un épiphénomène » explique-t-on à Seville ou l’on prévoit un avenir solide pour l’Atlas.
Deux avions, les MSN7 et MSN8 ont été livrés à l’armée de l’Air en 2013. Au 31 janvier, cette dernière aurait déjà réalisé une centaine de vols et prévoit de déclarer la MSO (Mise en Service Officiel) au début du troisième trimestre 2014. Airbus table pour 2014 sur la livraison de onze avions neufs (auquel s’ajoutera le MSN9 turc). Parmi ceux-ci, les premiers appareil britannique et allemand. D’un avion par mois cette année, le rythme de livraison va s’accélérer en 2015 à 1,5 avions par mois puis pratiquement deux par mois l’année suivante. Avec, en toile de fond les restrictions des budgets et l’étalement prévisibles des commandes déjà notifiées. Particulièrement dans le cas de la France pour laquelle la cible de 50 avions est toujours d’actualité, mais avec un calendrier plus distendu…
« De 2013 à 2016, la loi de programmation militaire française n’aura pas d’impact sur les livraisons des appareils » soulignent les responsables d’Airbus. « Après 2017 c’est plus flou, mais il y aura toujours des pays clients pour occuper des créneaux de fabrication que Paris souhaiterait libérer.
Pour ce qui est de l’activité aérienne, l’année 2013 s’est terminée en beauté avec un premier vol opérationnel du MSN 8 de l’armée de l’Air vers le Mali. Un périple Orléans-Bamako-Gao-Orléans qui a démontré la capacité d’emport, l’endurance et la capacité « tout terrain » de l’avion. L’Atlas peut rallier d’un coup d’aile Orléans à Bamako (2200 nautiques) avec trente tonnes en soute. L’année qui commence sera celle de l’ouverture progressive des capacités opérationnelles, avec en premier lieu une activité intense tournée vers le ravitaillement en vol et les aérolargages. France, Turquie et Grande-Bretagne fourniront des contingents de parachutistes pour ces essais.
Dans le même temps, Airbus va pousser les feux commercialement. « Nous avons reçu jusqu’ici neuf « Request For Information » souligne Didier Vernet, responsable du marketing pour l’avion. « Nous évaluons le marché accessible à l’A400M à 700 appareils, avec un objectif de 400 ventes pour nos avions ». Selon Airbus, la mise en service de l’Atlas sous les couleurs françaises devrait catalyser les campagnes de vente en cours. « Nous croyons à l’avion et notre compétition, qui est faible, nous offre une remarquable fenêtre de tir pour répondre aux besoins militaires mais aussi civils qui pourraient se faire jour » poursuite Didier Vernet. Airbus anticipe d’ailleurs une première vente export (en dehors des huit pays partenaires du programme) dès cette année. Une vision peut-être un peu optimiste étant donné la longueur de décision des contrats militaires. Mais Airbus y croit : si cela ne se fera pas en 2014, ce sera en 2015 et dans une des trois zones suivantes : l’Amérique Latine, le Moyen-Orient ou l’Asie. Quant à l’Amérique du Nord, il faudra attendre un peu : on ne croit pas à Seville à un contrat américain à court terme. Entre ses C-130J, C-17 et C-5M, l’USAF est déjà richement dotée. « On verra au-delà de 2020, en fonction de ce que pourront proposer les avionneurs américains d’ici là … » entend-on dire chez l’avionneur européen.Â
Diplômé universitaire en histoire, journalisme et relations publiques, en 1993, Philippe Cauchi amorce une carrière de journalisme, analyste et consultant en aérospatiale. En 2013, il fonde avec Daniel Bordeleau, le site d’information aérospatial Info Aéro Québec.
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